Sumer

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Sumer : descriptif

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Sumer

Sumer est une région antique, située à l'extrême sud de la Mésopotamie antique (actuel Irak), couvrant une vaste plaine parcourue par le Tigre et l'Euphrate, bordée, au sud-est, par le golfe Persique

Il s'y est développé une importante civilisation de l'Antiquité, à compter de la fin du IVe millénaire av

J.-C

et durant le IIIe millénaire av

J.-C. La langue dominante y était le sumérien, langue d'origine indéterminée qui n'a aucune parenté connue

Les locuteurs de cette langue, majoritairement localisés dans le pays de Sumer, ont été appelés « Sumériens Â» par les chercheurs qui l'ont découverte, mais il ne semble pas qu'une dénomination équivalente ait existé dans l'Antiquité

Le sumérien coexistait avec d'autres langues, en premier lieu l'akkadien, langue sémitique parlée dans la partie septentrionale de la Basse Mésopotamie (le pays d'« Akkad Â»)

Les synthèses récentes sur Sumer tendent, pour ces périodes, à couvrir toute l'histoire de la Basse Mésopotamie, sans s'arrêter au pays sumérien stricto sensu. On distingue plusieurs phases majeures dans cette période qui marque les commencements de la civilisation mésopotamienne

La période d'Uruk finale (v

3400 - 3100 av

J.-C.), qui voit l'apparition de l'écriture, est une phase de développement des institutions étatiques et urbaines, et d'un important rayonnement culturel du Sud mésopotamien sur les régions voisines

La période des dynasties archaïques (v

2900 - 2340 av

J.-C.) est marquée par la coexistence et souvent la confrontation de plusieurs petits royaumes, nommés couramment « cités-États Â» (Uruk, Ur, Lagash, Umma-Gisha, Kish, etc.)

Elles sont finalement unifiées dans l'empire d'Akkad (v

2340 - 2190 av

J.-C.), dominé par les populations sémitiques du Nord, qui s'étend sur toute la Mésopotamie et plusieurs régions voisines, puis s'effondre rapidement

Quelques décennies plus tard émerge la troisième dynastie d'Ur (v

2112 - 2004 av

J.-C.) qui domine à son tour une majeure partie de la Mésopotamie, mais est quant à elle dirigée par une élite venant du pays sumérien

C'est vers cette époque ou peu après que la langue sumérienne cesse d'être parlée, même si les cités de Sumer préservent leur vitalité au début du IIe millénaire av

J.-C., durant lequel le sumérien reste connu par l'élite cultivée. Complètement oubliée après les débuts de notre ère, la civilisation de Sumer est redécouverte durant la seconde moitié du XIXe siècle grâce aux fouilles de sites archéologiques du Sud mésopotamien

Celles-ci se sont poursuivies avant d'être arrêtées en raison des guerres qui affectent l'Irak à partir des années 1990, les chantiers étant lentement réouverts dans les années 2010

Outre des œuvres architecturales et artistiques souvent remarquables, elles ont mis au jour des dizaines de milliers de tablettes inscrites en écriture cunéiforme, qui constituent la plus ancienne documentation écrite connue avec celle de l’Égypte antique et font de Sumer l'une des plus anciennes civilisations historiques connues. L'analyse de cette documentation a montré que les Sumériens ont exercé une grande influence sur les civilisations antiques qui suivirent la leur, en particulier celles de la Mésopotamie

Même s'ils n'en ont pas été les seuls protagonistes, les Sumériens ont joué un rôle déterminant dans la mise en place de la civilisation mésopotamienne

Ils ont en particulier contribué à l'apparition des premiers États avec leurs institutions et administrations complexes, au développement des premières sociétés urbaines ainsi qu'à la mise au point de différentes techniques dans les domaines de l'agriculture, de la construction, de la métallurgie et des échanges commerciaux

Enfin, ils ont participé à la mise en place de systèmes de numération qui ont influencé ceux des cultures postérieures.

Histoire

L'histoire de Sumer est divisée en plusieurs périodes successives :

  • la période d'Uruk finale (vers 3400 - ), très novatrice, qui voit se mettre en place les éléments caractéristiques de la civilisation mésopotamienne antique ;
  • la courte période de Djemdet Nasr (vers 3100 - ) ;
  • la période des dynasties archaïques (vers 2900 - ), marquée par la division du pays de Sumer entre plusieurs cités-États ;
  • l'empire d'Akkad (vers 2340 - ), première unification de la Mésopotamie, par une dynastie non-sumérienne ;
  • la période « néo-sumérienne Â», surtout couverte par la nouvelle unification sous la troisième dynastie d'Ur (vers 2112 - ).

L'histoire politique est surtout bien connue à partir de , car la documentation est trop limitée pour les périodes antérieures. Il reste néanmoins impossible de répondre à de nombreuses questions sur l'enchaînement des événements observés et leur datation, qui reste très approximative.

Origines et premiers États

L'« expansion urukéenne Â» : les sites du « centre Â» situés en Basse Mésopotamie exercent une forte influence sur leurs « périphéries Â» situées en Haute Mésopotamie, Syrie et Iran durant les derniers siècles du

Les plus anciennes traces de peuplement en Basse Mésopotamie remontent aux derniers siècles du , et sont attestées sur le site de Tell el-Oueili. La période des premiers villages du sud mésopotamien est mal connue, car très peu de sites ont été fouillés.

La première culture connue du sud mésopotamien est celle d'Obeïd (du nom d'un site situé près d'Ur), divisée habituellement en cinq phases s'étendant approximativement sur le et le Le site le plus important de cette période est Eridu, où ont été dégagés plusieurs niveaux successifs d'un édifice monumental. Cette période verrait l'apparition de chefferies dominant des communautés d'agriculteurs et pratiquant des échanges à longue distance, quoique encore limités,,.

Durant la période d'Uruk (), surtout sa phase finale (vers 3400 - 3100/

En l'état actuel des choses, il est impossible d'établir avec certitude quel rôle ont joué les Sumériens dans ces sociétés. La documentation archéologique ne permet pas d'attribuer ces phases à un groupe ethnique, et il n'y a pas de consensus pour savoir si les premiers textes écrits comportent bien des traces de sumérien. L'origine des Sumériens (la « question sumérienne Â») fait donc l'objet de plusieurs approches qui peuvent être classées dans deux catégories :

  • Un premier ensemble d'hypothèses fait venir les Sumériens d'une région voisine de la Basse Mésopotamie ; ils seraient donc un élément extérieur à celle-ci, arrivés en ayant déjà leur langue et leur culture, et ne participeraient pas forcément aux premières périodes de développement des sociétés du delta mésopotamien. Plusieurs dates sont alors avancées pour l'arrivée des Sumériens dans la région. Ils pourraient être présents dès la période d'Obeid, parmi d'autres groupes de populations, ou bien ils pourraient seulement être arrivés au début du , quand les textes contiennent sans ambiguïté possible des éléments grammaticaux sumériens,,.
  • Un ensemble d'hypothèses opposé situe l'ethnogenèse des Sumériens dans la Basse Mésopotamie des débuts de la période d'Obeid ou peu après. Les différentes communautés hétérogènes qui s'installant dans la plaine deltaïque depuis des régions voisines auraient progressivement fusionné pour former un groupe ethnique, que l'on désigne comme les Sumériens,,,.

En tout état de cause, il est généralement admis que les Sumériens étaient déjà présents en Basse Mésopotamie durant la période d'Uruk et que c'est à ce moment et à cet endroit que se constitue la civilisation « sumérienne Â». Comme le souligne J. Cooper, même en admettant que les locuteurs du sumérien soient venus d'ailleurs, « les caractéristiques que les universitaires identifient comme sumériennes se sont très probablement développées au sein même de la Babylonie (i.e. la Basse Mésopotamie), et non dans un insaisissable pays d'origine extra-babylonien Â». Les Sumériens auraient alors été un élément moteur ou tout au moins auraient activement participé à la création des premiers États, des premières villes, de la première forme d'écriture et des entreprises de colonisation dans les pays voisins durant la période d'Uruk. Mais il faut selon toute vraisemblance admettre que la Basse Mésopotamie était déjà une société polyglotte, et donc pluri-ethnique, dans laquelle les éléments sumériens, sémites et autres coexistaient. Cela se dégage notamment de la présence, dans les textes anciens, de termes potentiellement issus de langues inconnues, notamment dans les noms de lieux. Certains ont voulu y voir un « substrat pré-sumérien Â» antérieur à l'installation des Sumériens dans la région, mais cela semble plutôt résulter de la diversité et de la fluidité linguistiques existant dès l'époque la plus ancienne.

Les dynasties archaïques : le temps des cités-États

Une attestation des conflits entre cités-États sumériennes à l'époque des dynasties archaïques : la Stèle des vautours montrant l'armée de Lagash triomphant des troupes d'Umma. Vers

La période d'Uruk s'achève vers la fin du , avec le début de la brève période de Djemdet Nasr (vers 3100 -

S'ouvre ensuite la période des dynasties archaïques (DA, vers 3000/2900 - 2350/

Les documents disponibles ne renseignent guère sur l'histoire politique de cette période, en dehors de quelques événements ponctuels attestés par des inscriptions royales du DA Lagash. La tradition mésopotamienne postérieure (notamment la Liste royale sumérienne) a conservé les noms de rois semi-légendaires qui ont peut-être effectivement vécu durant le DA Gilgamesh à Uruk, Enmebaragesi à Kish, ou Lugal-Ane-mundu à Adab, mais il est impossible d'en prouver l'historicité, sauf Enmebaragesi. Le DA ) a connu des conflits épisodiques entre les différents royaumes, marqués par l'hégémonie temporaire de certains souverains (Eanatum de Lagash, Enshakushana d'Uruk), avant l'émergence de Lugal-zagesi, venu d'Umma et roi d'Uruk, qui domina la Basse Mésopotamie.

L'empire d'Akkad

Étendue approximative de l'empire d'Akkad sous le règne de Naram-Sin.
Naram-Sîn d'Akkad, détail de la stèle de la victoire du roi Naram-Sin d'Akkad, musée du Louvre.

La période des cités-États s'acheva par leur unification vers 2350 -

La question des rapports entre la nouvelle élite dominante, à majorité akkadienne, et les Sumériens désormais non indépendants politiquement, fait débat : certains chercheurs estiment qu'il y a eu une forme d'opposition à base ethnique, mais les arguments en ce sens restent ténus. La séparation entre le nord et le sud de la Basse Mésopotamie, les pays d'Akkad et de Sumer, se reflète en tout cas dans le domaine ethnique, et sans doute aussi aux plans social et culturel, même si elle ne généra pas forcément des tensions de type ethnique. Les anciennes cités-États sumériennes étaient devenues des provinces dans l'empire, dont elles assuraient la prospérité économique grâce à leurs grands domaines placés sous la coupe de gouverneurs servant les rois d'Akkad.

La période « néo-sumérienne » et la troisième dynastie d'Ur

Statue de Gudea de Lagash, musée du Louvre.
L'extension approximative de l'empire de la troisième dynastie d'Ur sous le règne de Shulgi.

L'empire d'Akkad s'effondre un peu après

La domination des rois d'Akkad a donc été suivie de l'essor de dynasties issues des cités sumériennes (Lagash, Uruk, Ur) prospères économiquement et qui ont produit de remarquables réalisations artistiques et architecturales (statues de Gudea, ziggurats, etc.) et littéraires (en sumérien). Aussi, la fin du a-t-elle parfois été qualifiée de « renaissance sumérienne Â», grâce à l'indépendance acquise face aux Akkadiens. En réalité, pas plus que pour la période précédente, on ne peut adopter une grille de lecture basée sur une opposition ethnique entre Sumériens et Akkadiens, car ces deux peuples participaient d'une même civilisation.

La fin de Sumer et des Sumériens

La troisième dynastie d'Ur s'effondre vers

Les grandes villes du pays de Sumer (en premier lieu Nippur et Ur) restent les principaux foyers de cette langue, et c'est de cette période que date la majorité des sources attestant d'une littérature en langue sumérienne. Ces villes semblent avoir conservé une identité propre, qui ressort encore au début de la période de domination de la première dynastie de Babylone (au ) quand elles participent à des révoltes dans un contexte de crise grave entraînant l'abandon de ces villes pour quelques siècles. Les élites lettrées des villes de Sumer migrèrent alors vers plusieurs cités du pays d'Akkad où elles maintinrent leurs traditions. Quand les villes désertées se repeuplèrent dans la seconde moitié du , sous la dynastie kassite de Babylone, il n'y avait plus de pays de Sumer ni de Sumériens.

  1. ↑ (en) J. Oates, « Southern Mesopotamia Â», dans D.T. Potts (dir.), A Companion To The Archealogy Of The Ancient Near East, Oxford, , p. 466-467.
  2. ↑ P. Michalowski dans Sumer 1999-2002, col. 108-109.
  3. ↑ M. Sauvage, « Obeid (période) Â», dans Joannès (dir.) 2001, p. 597-598.
  4. ↑ Huot 2004, p. 57-66.
  5. ↑ P. Michalowski dans Sumer 1999-2002, col. 109-112 ; B. Lafont dans Sumer 1999-2002, col. 132-135 ; M. Sauvage, « Uruk (période) Â», dans Joannès (dir.) 2001, Huot 2004, p. 79-93
  6. ↑ Erreur de référence : Balise <ref> incorrecte : aucun texte n’a été fourni pour les références nommées eng
  7. ↑ (en) G. Algaze, The Uruk World System : The Dynamics of Early Mesopotamian Civilization, Chicago, 1993 (révisé en 2005).
  8. ↑ P. Butterlin, Les temps proto-urbains de Mésopotamie : Contacts et acculturation à l'époque d'Uruk au Moyen-Orient, Paris, .
  9. ↑ J. S. Cooper dans Sumer 1999-2002, col. 85-86.
  10. ↑ M.-J. Seux dans Sumer 1999-2002, col. 339-340.
  11. ↑ a et b (en) J. S. Cooper, « Sumer, Sumerisch (Sumer, Sumerian) Â», dans Reallexicon der Assyriologie und Vorderasiatischen Archäologie, vol. XIII, Berlin, De Gruyter, 2011-2013, p. 295-296
  12. ↑ J. S. Cooper dans Sumer 1999-2002, col. 86.
  13. ↑ J.-L. Huot dans Sumer 1999-2002, col. 97-98.
  14. ↑ M.-J. Seux dans Sumer 1999-2002, col. 340-341.
  15. ↑ « whatever qualities scholars identify as Sumerian very probably developed within Babylonia itself, and not insome elusive extra-Bab. homeland. Â» : (en) J. S. Cooper, « Sumer, Sumerisch (Sumer, Sumerian) Â», dans Reallexicon der Assyriologie und Vorderasiatischen Archäologie, vol. XIII, Berlin, 2011-2013, p. 295
  16. ↑ Erreur de référence : Balise <ref> incorrecte : aucun texte n’a été fourni pour les références nommées pluri
  17. ↑ (en) G. Rubio, « On the alleged pre-Sumerian substratum Â», Journal of Cuneiform Studies, no 51,‎ , p. 1-16.
  18. ↑ B. Lafont dans Sumer 1999-2002, col. 135-137.
  19. ↑ P. Michalowski dans Sumer 1999-2002, col. 112-113.
  20. ↑ B. Lafont dans Sumer 1999-2002, col. 138-139.
  21. ↑ M.-J. Seux dans Sumer 1999-2002, col. 342-343. 2017, p. 159-163
  22. ↑ P. Michalowski dans Sumer 1999-2002, col. 113-114 ; F. Joannès et B. Lafont, « Sumériens archaïques (rois) Â», dans Joannès (dir.) 2001, p. 801-803. Inscriptions royales de cette période traduites et commentées dans (en) D. Frayne, The Royal inscriptions of Mesopotamia : Early periods, vol. 3/1, Presargonic Period (2700–2350 BC), Toronto, 2008.
  23. ↑ P. Michalowski dans Sumer 1999-2002, col. 114-118.
  24. ↑ B. Lafont et B. Lion, « Akkad Â», dans Joannès (dir.) 2001, p. 22-26.
  25. ↑ M.-J. Seux dans Sumer 1999-2002, col. 347-349.
  26. ↑ Sur cette période, voir (en) A. Westenholz, « The Old Akkadian Period: History and Culture Â», dans W. Sallaberger et A. Westenholz, Mesopotamien, Akkade-Zeit und Ur III-Zeit, Fribourg, , p. 17-118.
  27. ↑ P. Michalowski dans Sumer 1999-2002, col. 118-122.
  28. ↑ B. Lafont, « Ur Joannès (dir.) 2001, p. 878-882
  29. ↑ (en) D. Frayne, The Royal inscriptions of Mesopotamia, Early periods, vol. 3/2, Ur III period (2112-2004 BC), Toronto, .
  30. ↑ (de) W. Sallaberger, « Ur-III Zeit Â», dans W. Sallaberger et A. Westenholz, Mesopotamien, Akkade-Zeit und Ur III-Zeit, Fribourg, , p. 121-377.
  31. ↑ M.-J. Seux dans Sumer 1999-2002, col. 351-352.
  32. ↑ M.-J. Seux dans Sumer 1999-2002, col. 353-354.
  33. ↑ Black et al. 2004, p. lv-lvi.
  34. ↑ Pour une présentation de ce phénomène, voir A. Jacquet, « Des exilés de Sumer en Babylonie Â», dans Guerres antiques et impériales en Orient, Dossiers d'Archéologie 2017, p. 349-353.

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