ville autonome de la Saint-Pétersbourg, Russie (Fédération) - Санкт-Петербург
Statistiques, géographie, démographie
Ville autonome de la Saint-Pétersbourg est une des 85 entités qui dépendent de la Russie (Fédération)
Pour info, la composition de la Russie (Fédération) correspond au moins à 47i oblasts, 21i républiques, 9 kraïs, 4 districts autonomes, 2 villes autonomes, un entité, un région autonome.
Fuseau horaire principal : +03:00
Langue officielle : Russe [inactif]
Ville autonome de la Saint-Pétersbourg comporte une population de 5 383 890i habitants (2019)
Localisation
Saint-Pétersbourg : descriptif
- Saint-Pétersbourg
Saint-Pétersbourg (prononcé en français : /sɛ̃.pe.tɛʁs.buʁ/ ; en russe : Санкт-Петербу́рг, Sankt-Peterbourg, [sankt pʲɪtʲɪrˈburk] , surnommée Piter ou Pétersbourg) est la deuxième ville de Russie par sa population, avec 5 281 579 habitants en 2021, après la capitale Moscou
Saint-Pétersbourg change plusieurs fois d'appellation : elle est rebaptisée Pétrograd (Петроград) de 1914 à 1924, puis Léningrad (Ленинград) de 1924 à 1991, avant de retrouver son nom d'origine à la suite d'un référendum en 1991. Plus grande métropole septentrionale du monde, la « Capitale du Nord » comme elle est considérée par les Russes, est située dans le Nord-Ouest du pays sur le delta de la Neva, au fond du golfe de Finlande, un espace maritime de la mer Baltique
Saint-Pétersbourg a le statut de ville fédérale de Russie, et elle est enclavée dans l'oblast de Léningrad, bien qu'elle en soit administrativement indépendante
Capitale de l'Empire russe de 1712 jusqu'en mars 1917, ainsi que de la Russie dirigée par les deux gouvernements provisoires entre mars et octobre 1917, Saint-Pétersbourg a conservé de cette époque un ensemble architectural unique
Deuxième port russe sur la mer Baltique après Primorsk, c'est aussi un centre majeur de l'industrie, de la recherche et de l'enseignement russe ainsi qu'un important centre culturel européen
Saint-Pétersbourg est la deuxième ville d'Europe par sa superficie, la quatrième par sa population après Istanbul, Moscou et Londres et la septième pour celle de son agglomération
De nombreuses institutions y sont situées, telles que la Cour constitutionnelle de la fédération de Russie, la bibliothèque nationale russe et la Société russe de géographie. Saint-Pétersbourg est fondée en 1703 par le tsar Pierre le Grand dans une région disputée depuis longtemps au royaume de Suède
Par son urbanisme résolument moderne et son esthétique d'origine étrangère, la nouvelle ville devait permettre à la Russie d’« ouvrir une fenêtre sur l'Europe » et contribuer, selon le souhait du tsar, à hisser la Russie au rang des grandes puissances européennes
Le centre-ville, construit sur des directives des souverains russes, présente une architecture unique qui mélange des styles architecturaux (baroque, néo-classique) adaptés de manière originale par des architectes
Ses canaux et ses rivières bordés de palais lui valent le surnom de « Venise de la Baltique », tandis que ses colonnades ou son « ordonnancement de perspectives, de palais, de bâtiments, de parcs et d'avenues » celui de « Palmyre du Nord ». La ville est un important centre culturel européen et abrite le port de la mer Baltique le plus important de Russie
Le centre historique de la ville, avec ses 2 300 palais, ses magnifiques bâtiments et ses châteaux, figure depuis 1991 sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO sous le terme collectif de Centre historique de Saint-Pétersbourg et ensembles monumentaux annexes
À cet égard, Saint-Pétersbourg n'est comparable au niveau mondial qu'à Venise
La ville abrite le plus haut gratte-ciel d'Europe, le Lakhta Centre, qui mesure 462 mètres.
Géographie
Situation
La ville de Saint-Pétersbourg se situe à 635 Moscou, à 317 Tallinn et à 300 Helsinki. Elle est construite sur le delta marécageux de la Neva au fond du golfe de Finlande en mer Baltique. La ville a une superficie de 606 Peterhof et Pouchkine), dont 10 % d'étendues d'eau. Elle s'étend sur 90 km du nord-ouest au sud-est. La ville compte 42 îles et est construite de 2 à 4 mètres au-dessus du niveau de la mer. La nappe phréatique est très proche de la surface. Les rives du fleuve ont été consolidées à l'aide de pierres granitiques qui non seulement protègent la ville des eaux, mais également contribuent à lui donner son cachet. Alexandre Pouchkine écrit en parlant de Saint-Pétersbourg : « La Neva s’est habillée de granit. »
Du fait de sa faible élévation au-dessus du niveau de la mer, Saint-Pétersbourg est souvent victime d'inondations. En 2003, les statistiques officielles décomptaient 295 inondations depuis sa fondation, dont 44 depuis 1980. Les inondations les plus sévères ont lieu en 1824 (elle aurait fait, selon les statistiques, de 200 à 500 victimes) et en 1924.
Hydrographie
La longueur totale de tous les cours d'eau sur le territoire de Saint-Pétersbourg atteint 282 km et leur surface d'eau représente environ 10 . Au cours de l'existence de la ville, le réseau hydrologique a subi des changements importants. Sa construction dans un endroit bas marécageux a nécessité la construction de canaux et d'étangs de drainage. La terre draguée a été utilisée pour élever la surface. À la fin du XIXe siècle, le delta de la Neva se composait de 48 rivières et canaux, formant 101 îles. Au fil du temps (au fur et à mesure de la construction de la ville), de nombreux réservoirs ont perdu leur valeur d'origine, se sont pollués et se sont remplis. Au XXe siècle, à la suite du remblayage des canaux, canaux et embranchements, le nombre d'îles a été réduit à 42.
93 rivières et bras de rivières traversent Saint-Pétersbourg. La principale voie navigable de la ville est la rivière Neva, qui se jette dans la baie de la Neva du golfe de Finlande, qui appartient à la mer Baltique. La Neva est un fleuve très court (74 bassin versant de 218 000 France). À Saint-Pétersbourg, la Neva est large de 600 mètres et la vitesse du courant est élevée. Sur les 74 Grande Neva et Petite Neva, Grande Nevka et Petite Nevka, Fontanka, Moïka, Yekateringofka, Krestovka, Karpovka, Jdanovka, Smolenka, Priajka, détroit Kronverksky. Les principaux canaux sont le canal de la mer, le canal Obvodny, le canal Griboïedov, le canal Krioukov. Les principaux affluents de la Neva au sein de la ville sont, à gauche : Ijora, Slavïanka, Mourzinka, et à droite : Okhta, Tchernaïa Retchka.
Îles
Saint-Pétersbourg compte de nos jours 42 îles. À l'origine, il y en avait un plus grand nombre, mais de nombreux canaux ont été comblés. Les plus grandes îles du delta de la Neva sont l'île Vassilievski, l'île Petrogradski, l'île Krestovski, l'île des Décembristes et l'île Elaguine. La plus grande île du golfe de Finlande est Kotline (qui abrite la ville de Cronstadt). Environ 800 ponts ont été jetés sur les plans d'eau de la ville (sans compter les ponts sur les territoires des entreprises industrielles), dont 218 piétons et 22 ponts-levis.
Problèmes environnementaux
Jusqu'au golfe de Finlande arrivaient à recycler naturellement les effluents produits par la ville. D'ailleurs de nos jours, les eaux usées des 5 millions d'habitants et des nombreuses industries ne représentent toujours que 2 % des eaux déversées par la Neva. Mais, au milieu du choléra et de typhus éclata à cause de la mauvaise qualité des eaux. En 1908, une épidémie de typhus fit 9 000 victimes. Le problème fut réglé en 1910 par une modification du lieu de captage des eaux de la ville. Dans les années 1950 et 1960, l'accroissement rapide de la population remit le sujet à l'ordre du jour. Circonstance aggravante, les eaux de la Neva étaient alors très polluées avant même de pénétrer dans la ville : issues du lac Ladoga, elles étaient à la fois dégradées par les nombreuses usines installées sur le pourtour de ce lac et par la qualité médiocre des eaux des rivières alimentant le lac. Une usine de traitement fut construite à l'époque, mais, de nos jours, 25 à 30 % des eaux usées ne sont toujours pas traitées. Le golfe de Finlande abrite essentiellement des espèces d'eau douce et quelques espèces d'eau saumâtre. L'écosystème local est fortement menacé par les activités humaines.
Pour protéger Léningrad des inondations, le gouvernement soviétique a lancé en 1978 la construction du barrage de Saint-Pétersbourg, long de 25 Kotline sur laquelle est édifiée Kronstadt. Ces inondations ne sont pas liées aux périodes de hautes eaux de la Neva, mais à la pression exercée par les vents d'ouest sur les eaux du golfe qui empêchent les eaux du fleuve de s'écouler dans le golfe et qui, dans les cas extrêmes, les refoulent vers l'amont. Pour des raisons écologiques, la construction du barrage fut arrêtée à la fin des années 1980 alors que la moitié nord était déjà achevée : on s'était rendu compte que le barrage perturbait fortement la circulation des eaux côtières et avait fortement fait baisser leur qualité en les rendant en partie stagnantes. On craignait à l'époque que tout le fond du golfe se transformât en marécage. La construction reprit en 1990 avec l'aide technique des Néerlandais, spécialistes reconnus dans ce domaine, et l'appui financier de la Banque européenne d'investissement. Dans la mesure où les menaces pour l'environnement existent toujours, le barrage reste un sujet très controversé chez les habitants de Saint-Pétersbourg.
Climat
Saint-Pétersbourg se trouve à la même latitude que les villes d'Oslo et de Helsinki ainsi que du Sud des îles Shetland ou de l'Alaska ou de la pointe sud du Groenland. Elle bénéficie d'un climat continental humide caractérisé par de forts contrastes thermiques entre l'hiver et l'été. Les étés sont relativement chauds avec une température moyenne comprise entre 19 et 22 solstice d'été ne sont jamais complètement obscures (« nuits blanches »). Le record de température à Saint-Pétersbourg est de 37,1 °C le 7 août 2010.
Mois | jan. | fév. | mars | avril | mai | juin | jui. | août | sep. | oct. | nov. | déc. | année |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Température minimale moyenne (°C) | −7,2 | −7,6 | −4 | 1,7 | 7,2 | 12,2 | 15,3 | 13,9 | 9,4 | 4,1 | −0,9 | −4,5 | 3,3 |
Température moyenne (°C) | −4,8 | −5 | −1 | 5,2 | 11,5 | 16,1 | 19,1 | 17,4 | 12,4 | 6,2 | 0,9 | −2,5 | 6,3 |
Température maximale moyenne (°C) | −2,5 | −2,4 | 2,3 | 9,5 | 16,3 | 20,5 | 23,3 | 21,4 | 15,9 | 8,7 | 2,8 | −0,5 | 9,6 |
Record de froid (°C) date du record |
−35,9 1883 |
−35,2 1956 |
−29,9 1883 |
−21,8 1881 |
−6,6 1885 |
0,1 1930 |
4,9 1968 |
1,3 1966 |
−3,1 1976 |
−12,9 1920 |
−22,2 1890 |
−34,4 1978 |
−35,9 1883 |
Record de chaleur (°C) date du record |
8,7 2007 |
10,2 1989 |
15,3 2015 |
25,3 2000 |
33 2014 |
35,9 2021 |
35,3 2010 |
37,1 2010 |
30,4 1992 |
21 1889 |
12,3 1967 |
10,9 2006 |
37,1 2010 |
Ensoleillement (h) | 22 | 54 | 125 | 180 | 260 | 276 | 267 | 213 | 129 | 70 | 27 | 13 | 1 636 |
Précipitations (mm) | 46 | 36 | 36 | 37 | 47 | 69 | 84 | 87 | 57 | 64 | 56 | 51 | 670 |
dont neige (cm) | 15 | 19 | 14 | 1 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 3 | 9 | 61 |
Record de pluie en 24 h (mm) date du record |
23 1955 |
23 1990 |
26 1971 |
29 1991 |
56 1916 |
44 2004 |
69 2002 |
76 1947 |
34 1912 |
37 2003 |
31 2010 |
28 2009 |
76 1947 |
Nombre de jours avec précipitations | 9 | 7 | 10 | 13 | 16 | 18 | 17 | 17 | 20 | 20 | 16 | 10 | 173 |
Humidité relative (%) | 86 | 84 | 79 | 69 | 65 | 69 | 71 | 76 | 80 | 83 | 86 | 87 | 78 |
Nombre de jours avec neige | 25 | 23 | 16 | 8 | 1 | 0,1 | 0 | 0 | 0,1 | 5 | 16 | 23 | 117 |
Nombre de jours d'orage | 0,1 | 0 | 0 | 0,2 | 2 | 4 | 5 | 3 | 1 | 0,2 | 0,1 | 0,03 | 16 |
Nombre de jours avec brouillard | 2 | 2 | 3 | 2 | 1 | 0,3 | 0,2 | 1 | 2 | 2 | 2 | 2 | 20 |
Diagramme climatique | |||||||||||
J | F | M | A | M | J | J | A | S | O | N | D |
−2,5 −7,2 46 | −2,4 −7,6 36 | 2,3 −4 36 | 9,5 1,7 37 | 16,3 7,2 47 | 20,5 12,2 69 | 23,3 15,3 84 | 21,4 13,9 87 | 15,9 9,4 57 | 8,7 4,1 64 | 2,8 −0,9 56 | −0,5 −4,5 51 |
Moyennes : • Temp. maxi et mini °C • Précipitation mm |
- Pouchkine, , vers 38.
- Gouvernement de Saint-Pétersbourg 2022, p. 4.
- », Погода и Климат (consulté le ).
- », NOAA (consulté le ).
Toponymie
Saint-Pétersbourg ne doit pas son nom à son fondateur, le tsar Pierre le Grand, mais à l'apôtre Pierre. Toutefois, la ville a reçu quatorze désignations différentes à l'origine ; les plus fréquentes sont : Sankt Piter-Bourkh ou Piter-Bourkh (dérivé du néerlandais Sint Pietersburg), mais aussi Petropol, voire Petropolis. La forteresse, embryon de la ville, a porté brièvement le nom de Sankt-Pieterburch, puis la ville a été renommée rapidement Sankt-Peterbourg (avec une forte consonance allemande).
Au cours du XXe siècle, la ville a été rebaptisée trois fois pour des raisons politiques :
- Tout d'abord, le , un mois après l'entrée en guerre de la Russie dans le conflit européen, qui s'accompagne d'une poussée de nationalisme slave et d'anti-germanisme, le nom de Saint-Pétersbourg, jugé trop allemand, est russifié en Petrograd (en cyrillique Петроградъ, littéralement : « la ville de Pierre »).
- En 1924, à la mort de Lénine, la ville qui fut le théâtre de la révolution d'Octobre reçoit le nom du fondateur de l'URSS, devenant ainsi Léningrad (Ленинград) (littéralement : « la ville de Lénine »). D'un point de vue symbolique, des raisons plus profondes justifiaient ce changement : les appellations Saint-Pétersbourg, puis Petrograd, étaient rattachées au régime tsariste et à son statut de capitale impériale ; il convenait donc pour les révolutionnaires de faire table rase du passé. Elle était également la deuxième ville de la Russie, ce qui concourait à rehausser le prestige du fondateur et dirigeant du parti bolchevik.
- Enfin, le , peu avant la disparition de l'URSS, le changement de nom est soumis à un référendum au cours duquel une majorité de 55 % se prononce pour le retour à l’appellation d'origine, Saint-Pétersbourg. Le changement de nom devient effectif le .
Le territoire administratif régional a gardé après un référendum le nom d'oblast de Léningrad.
Saint-Pétersbourg est également appelée familièrement « Piter » (Питер) par ses habitants. Pour les Russes, c'est la « capitale du Nord » (северная столица, severnaïa stolitsa). Par son histoire mouvementée au Palmyre du Nord » (en russe : Пальмира Севера, Palmira Severa), la « Palmyre septentrionale » (en russe : Северная Пальмира, Severnaïa Palmira) ou la « Palmyre finlandaise » (en russe : Финская Пальмира, Finskaïa Palmira).
- Wladimir Berelowitch, Olga Medvedkova, Histoire de Saint-Pétersbourg, p. 27.
- Jean des Cars, Saint-Pétersbourg, sur les pas des Tsars, Perrin, (ISBN ), p. 9
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Histoire
Une fenêtre sur l'Europe
La fondation d'une nouvelle capitale fait partie de la série de réformes entreprises par le tsar Pierre le Grand pour faire de la Russie un pays moderne et une puissance européenne. Lorsque Pierre le Grand arrive au pouvoir, la Russie est un pays sans universités, sans scientifiques ni techniciens, placé sous la coupe d'une Église et d'une noblesse terrienne particulièrement conservatrices. Dépourvue de marine et défendue par une armée sans cadres professionnels ni armements modernes, la Russie n'arrive pas à s'imposer face à ses puissants voisins que sont la Suède et l'Empire ottoman. Hormis ses églises et le Kremlin, Moscou est une ville de maisons en bois. De plus, Pierre le Grand n'apprécie pas Moscou pour ses traditions qu'il juge passéistes, notamment les « coins rouges », foyers religieux remplis d'icônes dans chaque maison moscovite, et certains de ses quartiers vétustes régulièrement victimes d'incendies.
La création de Saint-Pétersbourg va permettre à Pierre de disposer d'un véritable port en eaux libres qui lui permet de créer une marine de guerre et de commercer facilement avec les autres pays d'Europe. Sa création doit lui permettre également de disposer d'une capitale moderne, semblable aux villes européennes qu'il a pu découvrir durant la Grande Ambassade. Il s'agit d’« ouvrir une fenêtre sur l'Europe » source de progrès et de modernité, selon la formule attribuée au voyageur et écrivain italien Francesco Algarotti (1736).
La fondation
Les circonstances du choix de l'emplacement de Saint-Pétersbourg sont l'objet d'un mythe qui attribue à Pierre le Grand un rôle central. Selon cette légende, le tsar visionnaire aurait choisi au premier coup d'œil d'implanter sa future capitale dans une région de marécages dépourvue d'habitants située à l'embouchure de la Neva. L'illustration la plus connue de la « capitale sortie du néant » par la volonté créatrice d'un souverain inspiré se trouve dans le poème Le Cavalier de bronze d'Alexandre Pouchkine (1834).
En réalité, la région qui borde le cours inférieur de la Neva, l'Ingrie, était déjà peuplée par des Finno-Ougriens qui vivaient depuis le Suède et la république de Novgorod se disputèrent le contrôle de cette région. Une colonie suédoise, sans doute située sur l'emplacement de la ville, fut détruite en 1301. Finalement, les deux puissances se mirent d'accord pour faire de la région une zone tampon dans laquelle aucune fortification ne pourrait être construite. Au cours des siècles suivants, la région servit de lieu de débarquement pour les navires empruntant la Neva et peut-être également de place commerciale. Ce dernier rôle est attesté à compter de 1611, date à laquelle les Suédois, profitant de leur suprématie du moment sur la région, construisent la forteresse de Nyenschantz ainsi que la colonie voisine de Nyen, un peu plus tard. Toutes deux se trouvaient à l'emplacement actuel de Saint-Pétersbourg, sur la rive nord (c'est-à-dire droite) de la Neva. Il existe également des preuves que la Suède envisageait, au Première Guerre russo-suédoise (1656) et la ville et la forteresse furent détruites par les troupes russes.
La construction du premier édifice par les Russes se situe en 1703 après la conquête définitive de Nyenkans (Nyenschantz) par les troupes russes placées sous les ordres de Cheremetev durant la grande guerre du Nord. Nyenschantz avait été préventivement évacuée et partiellement détruite par les Suédois. La date officielle de la fondation de la ville est le ( dans le calendrier grégorien) : ce jour-là, sur l'île des Lièvres (l'île Jänisaari en finnois), la première pierre de la forteresse Pierre-et-Paul, du nom des saints patrons du tsar, est posée.
Pierre le Grand ne semble pas avoir projeté, dès le début, de faire de la forteresse le noyau d'une ville de plus grande taille et a fortiori de sa future capitale. La fonction de la forteresse Pierre-et-Paul était en premier lieu de reprendre le rôle de Nyenschantz, c'est-à-dire de protéger l'accès à l'embouchure de la Neva, mais cette fois au bénéfice des Russes. L'endroit était peu propice à la création d'une ville. Une grande partie des environs n'était pas cultivable. Le delta était fréquemment sujet à des inondations : celles-ci feront à plusieurs reprises de nombreuses victimes parmi les habitants de la ville.
En dépit de ce contexte défavorable, Pierre le Grand choisit finalement en 1706 d'y construire sa nouvelle capitale, sans doute parce que l'emplacement de Saint-Pétersbourg en fait un bon port maritime le plus souvent libre des glaces et bien relié au réseau fluvial de la Russie. Les armoiries de la ville, qui représentent un sceptre, une ancre de marine et un grappin de péniche illustrent bien ces motivations. Le deuxième atout de cet emplacement est la proximité de l'Europe occidentale, que Pierre le Grand souhaite utiliser pour moderniser la Russie. Une fois ses intentions arrêtées, Pierre y consacre une grande partie des ressources de la Russie.
Les conditions de travail sont éprouvantes : on estime que des dizaines de milliers de travailleurs et de serfs trouvent la mort, victimes de la fièvre des marais (marais de l'Ingrie), du scorbut, de la dysenterie ou tout simplement morts de faim ou d'épuisement. Une grande partie de la ville repose sur des pilotis, mais les habitants ont coutume de dire que la ville est bâtie sur les squelettes de ses constructeurs. Au début, près de la moitié des ouvriers contraints à travailler réussissent à s'enfuir vers le nord-ouest. Les ouvriers qui sont rattrapés sont sévèrement punis.
Les premières années, le chantier est menacé par un revers des armées russes face aux troupes suédoises qui ont pénétré profondément dans le pays : la défaite des Suédois à la bataille de Poltava en 1709 écarte finalement tout danger : la paix est signée en 1721.
En 1712, la Cour, les ambassades et le sénat sont transférés dans la nouvelle capitale. Pour peupler Saint-Pétersbourg, Pierre le Grand donne l'ordre aux principales familles nobles de Moscou de s'installer dans la nouvelle ville. Celles-ci sont contraintes d'emménager avec toute leur maisonnée dans des constructions dont l'apparence et les dimensions sont imposées et qui sont construites à leurs frais. Tous les habitants sont contraints de planter des arbres. Dès 1714, 50 000 logements sont occupés ; Saint-Pétersbourg est la première ville de Russie à disposer d'une police municipale et d'un système de couvre-feu qui fonctionne. Le centre-ville est éclairé la nuit.
L'épanouissement
Pierre le Grand fait venir dès la fondation de la ville des artisans et ingénieurs de toute l'Europe, en particulier des Pays-Bas, pour faire de la ville un centre majeur des techniques et des sciences.
Après la mort de Pierre le Grand en 1725, l'enthousiasme des souverains russes pour la « fenêtre sur l'Occident » retombe. En 1728, d'après l'ordre de l'empereur , Moscou redevient la capitale. Mais en 1730 il meurt et, avec l'arrivée au pouvoir d'Anne, Saint-Pétersbourg retrouve la priorité. Elle redevient la capitale de l'Empire. Les travaux menés par Anne ont laissé une profonde empreinte : elle fait construire le centre-ville du quartier de Pétrograd sur la rive gauche de la Neva, côté Amirauté et fait tracer les grandes avenues : les perspectives Nevski et Voznessenski et la rue Gorokhovaïa. Pourtant, elle préfère Moscou où elle réside le plus fréquemment.
Les impératrices Élisabeth (1741-1761) et surtout renforcent la politique d'ouverture vers l'Europe occidentale et font venir à Saint-Pétersbourg des artistes et des architectes. Les prestigieux bâtiments qui ont forgé l'image de la ville sont construits sous le règne d'Élisabeth : elle fait ainsi édifier le palais d'Hiver et le monastère Smolny. Elle fait reconstruire le palais Catherine, en ayant recours à l'architecte baroque d'origine italienne Bartolomeo Rastrelli qui réalise plusieurs des grands bâtiments de la ville.
Catherine Baroque Rastrelli » trop vieillot, elle le limoge et recrute de jeunes architectes et sculpteurs au style néo-classique comme Jean-Baptiste Vallin de La Mothe, Étienne Maurice Falconet, Nicolas-François Gillet et Antonio Rinaldi. C'est une représentante du siècle des Lumières, au moins jusqu'à la Révolution française, et Catherine fait fortement progresser la culture et l'art. Catherine statue équestre de Pierre le Grand, monument emblématique de la ville, date également de son règne.
À la fin du 1738. En 1757, c'est au tour de l'Académie impériale des beaux-arts dans laquelle sont formés encore aujourd'hui peintres, sculpteurs et architectes. Des universités et des bibliothèques sont créées : en 1783 s'ouvre le théâtre Mariinsky, dans lequel seront joués les premiers opéras russes de Mikhaïl Glinka. En 1804, l'Académie du génie Nicolas est ouverte puis, en 1819, l'université d'État de Saint-Pétersbourg.
L'abolition du servage de 1861 par Alexandre fait affluer dans la ville un grand nombre de paysans qui ne peuvent se nourrir sur les terres qui leur ont été attribuées. La population (en particulier ouvrière) augmente très rapidement en quelques années.
Les écrivains et les intellectuels se réunissent dans des cercles littéraires et publient des dictionnaires et des revues. Parmi les principales revues, l’Étoile polaire de Ryleïev et Bestouchev et Le Contemporain d'Alexandre Pouchkine.
Soulèvements, attentats et révolutions
Les principales grèves, révoltes et révolutions de la période moderne de l’histoire russe, depuis l'insurrection décabriste en décembre 1825 jusqu’à la révolution russe, ont lieu à Saint-Pétersbourg. À la fin du XIXe siècle, les troubles et les petits soulèvements sont un phénomène fréquent dans la ville.
Celle-ci est le théâtre d’un grand nombre d’attentats contre des représentants de l'empereur et de l’administration russes, le plus connu étant l'assassinat d' en . Port et ville industrielle importante, sa population ouvrière est nombreuse et sensible aux idées socialistes dès la fin du XIXe siècle.
Des partis et associations révolutionnaires sont créés à Saint-Pétersbourg et réprimés de manière sanglante par la police. Le , le pont égyptien s'effondre lors du passage d'un escadron de cavalerie. La révolution de 1905 se déclenche à Saint-Pétersbourg durant l’épisode du Dimanche rouge. À la suite de cette révolution, la deuxième douma de l’histoire de Russie est convoquée dans la ville. La révolution de février 1917 a également lieu pour l’essentiel à Saint-Pétersbourg. Le signal de départ de la révolution d’Octobre, la même année, est un coup de canon tiré par le croiseur ancré dans le port de Pétrograd. Lénine transfère la capitale à Moscou peu après.
En 1921, le port voisin de Kronstadt est le centre d’une révolte armée de marins qui contestent le pouvoir bolchevik. Ce soulèvement est durement réprimé puis écrasé par l'armée rouge dirigée par Léon Trotski.
Léningrad
La population de la ville qui avait atteint plus de 2 millions d'habitants avant la révolution est divisée par trois : l'émigration (et l'élimination) de la noblesse, d'une grande partie de l'intelligentsia ainsi que des classes moyenne et aisée libèrent des milliers d'appartements au cœur de la ville qui sont rapidement transformés en appartements communautaires par les familles ouvrières venues de la périphérie. La famine due à la guerre civile (1917-1923) chasse les habitants. La perte du statut de capitale entraîne le transfert de beaucoup d'emplois vers Moscou.
Après la mort de Lénine en 1924, la ville est rebaptisée Léningrad. Le centre du pouvoir soviétique se déplace à Moscou. Staline écarte les dirigeants du parti communiste de Léningrad qui exercent encore une influence sur la direction de l’État soviétique : en décembre 1934, le responsable du parti à Léningrad, Sergueï Kirov, est assassiné à l'Institut Smolny. L'assassinat sert de prétexte au déclenchement d'une féroce répression dans la région de Léningrad d'abord, puis dans toute l'URSS (Grandes Purges), qui va décimer l'élite historique du parti et la population soviétique et permettre à Staline d'asseoir sa dictature : l’ancien président du soviet de Léningrad Grigori Zinoviev est, avec Lev Kamenev, l'une des victimes les plus connues.
L’opposition entre Moscou et Léningrad se manifeste également à cette époque à travers la stratégie de développement de la ville. Le nouveau plan d’urbanisme de Léningrad prévoit de déplacer le centre de la ville autour de la nouvelle place de Moscou et de la perspective Moskovski, au sud des quartiers historiques. La forme et les noms choisis sont destinés à nier le rôle historique de la ville et à la faire rentrer dans le rang des villes soviétiques. Le centre-ville hérité de l'ancien régime est laissé à l'abandon, les monuments religieux sont fermés ou reconvertis, et de nombreuses appellations sont modifiées (la perspective Nevski devient l'« avenue du »).
La campagne de collectivisation des terres (1929-1933) entraîne l'arrivée de centaines de milliers de paysans qui se font embaucher dans les usines locales. La population remonte à près de 3 millions d'habitants à la veille de la Seconde Guerre mondiale.
Le siège de Léningrad
Au cours de la Seconde Guerre mondiale, la prise de Léningrad fait partie des objectifs stratégiques assignés par Hitler aux armées allemandes. L'avance des troupes en territoire russe leur permet d'encercler presque complètement Léningrad à compter du avec l'aide des troupes finlandaises, qui sont revenues sur leur ancienne frontière en Carélie. Les Allemands renoncent à prendre d'assaut la ville, bien défendue par des lignes de tranchées et des obstacles antichars préparés dès et par des troupes placées sous le commandement de Joukov. Les Allemands décident de mettre le siège en coupant toutes les lignes d'approvisionnement en vivres et munitions en espérant ainsi affamer les trois millions d'habitants et les défenseurs. Le siège dure 900 jours, mais la ville résiste jusqu'à son dégagement par les troupes russes en 1944. Les pertes sont colossales : 500 000 victimes militaires, mais surtout 1,2 million de civils, morts de faim pour la plupart. Durant le siège, 150 000 obus d'artillerie et 100 000 bombes aériennes tombent sur la ville. Les objectifs visés sont les grandes entreprises, mais également les principaux monuments de la ville, les écoles, les dépôts de tramway ainsi que les quartiers résidentiels pour tenter de démoraliser la population. L'unique lien avec l'extérieur est assuré par la voie aérienne (mais les Allemands ont la maîtrise des airs) et par le sud du lac Ladoga dont les Soviétiques conservent la maîtrise. Sur ce dernier, durant l'hiver 1941, une route est tracée (en russe : Дорога жизни la route de la vie) et une voie de chemin de fer est posée, mais une partie du parcours est sous le feu de l'artillerie allemande : sur trois camions tentant de forcer le blocus, un seul parvient en moyenne à Léningrad. Plus d'un million de personnes sont évacuées par ce chemin, pour la plupart des enfants. La première année, la famine est terrible et fait près de 500 000 victimes. Les autorités de la ville sont mal préparées au siège et l'évacuation comme le ravitaillement sont désorganisés. Les attaques aériennes anéantissent une partie du stock de nourriture. Dès , les rations tombent à 400 grammes de pain par travailleur, 200 grammes pour les enfants et les femmes. Cette ration est à nouveau réduite en novembre respectivement à 200 grammes et 125 grammes. L'hiver est particulièrement froid avec des températures de −40 desserre l'étau en : les troupes soviétiques de Léningrad et celles du front de Volkhov réussissent après des combats acharnés à ouvrir un corridor au sud du lac Ladoga, par lequel peut passer le ravitaillement à partir du 1943. En , une offensive soviétique sur le front sud permet de lever le blocus : une route terrestre est enfin ouverte. Durant l'été 1944, les troupes finlandaises sont à leur tour repoussées.
L'après-guerre
Léningrad se retrouve après la Seconde Guerre mondiale dans une situation paradoxale. D'un côté, la ville devient le symbole de la résistance soviétique aux envahisseurs et des souffrances endurées par le pays, d'un autre côté, cette période est marquée jusqu'aux années 1950 et au-delà par les luttes de pouvoir entre les fonctionnaires de Moscou et de Léningrad. La reconstruction de la ville est une question de prestige pour l'Union soviétique. Aussi en très peu de temps, un million d'ouvriers se mettent à reconstruire la ville avec la volonté de restaurer les édifices les plus prestigieux. En 1945, Léningrad se voit décerner le titre de « ville héroïque ».
Après-guerre, de nouveaux quartiers sont édifiés : le volume de logements construits culmine en 1963. Par contre, le 1953 est repoussé car à cette époque, la lutte de pouvoir avec Moscou est toujours en cours et une célébration de ce type aurait pu être mal interprétée. Par ailleurs, la mort récente de Staline s'accommodait mal d'une fête. La célébration a finalement lieu en 1957 sous Nikita Khrouchtchev sans mentionner qu'il s'agit en fait du 254e anniversaire.
Au cours des années suivantes, la ville conserve son rôle de grande ville industrielle et de centre scientifique majeur de l'Union soviétique. Mais il est clair à cette époque que le centre politique et culturel se trouve désormais à Moscou. La population avait été marquée par les événements de la guerre et une grande partie de ses habitants s'y étaient installés après-guerre, aussi leur attachement à Léningrad était de plus en plus faible.
En 1988, un incendie à l'Académie des sciences détruisit près d'un million d'ouvrages stockés dans la bibliothèque. En 1989, le centre-ville est déclaré zone protégée.
Le Saint-Pétersbourg contemporain
Le 12 juin 1991, les habitants de la ville se sont prononcés par référendum pour que la ville retrouve son nom originel ce qui devient effectif le 6 septembre 1991. Toutefois, la région a gardé son nom soviétique (l'oblast de Léningrad).
Durant la tentative de putsch contre le président Boris Eltsine en octobre 1993, le maire de Saint-Pétersbourg Anatoli Sobtchak rassemble les partisans de la démocratie pour manifester devant le palais d'Hiver contre les putschistes.
En 1991, la superficie de la ville de Saint-Pétersbourg augmente considérablement par intégration des villes satellites de Kolpino, Krasnoïe Selo, Pouchkine, Lomonossov, Pavlovsk, Kronstadt, Peterhof, Sestroretsk et Zelenogorsk. Ces villes sont désormais considérées comme des quartiers de Saint-Pétersbourg et ne font plus partie du territoire de l'oblast de Léningrad.
Le 27 mai 2003, les fêtes du 300e anniversaire de la fondation de la ville sont célébrées. À cette occasion, des quartiers de la vieille ville et plusieurs palais sont restaurés. La ville se retrouve pour la première fois depuis longtemps au centre de l'attention du monde entier. Comme les rénovations avaient surtout concerné les façades et certains édifices prestigieux, des critiques soulignèrent qu'il s'agissait d'une restauration à la manière des villages de Potemkine. Toutefois, ces critiques cessèrent par la suite, car les travaux se poursuivirent après le jubilé et continuent encore aujourd'hui en partie grâce à des investisseurs privés.
Le , une attaque terroriste kamikaze à la bombe dans le métro de Saint-Pétersbourg fait 14 morts et 51 blessés.
- Dominique Fernandez, La Magie blanche de Saint-Pétersbourg[réf. incomplète], citant Pouchkine, , vers 16.
- Lieven 2006, p. 496.
- Ettore Lo Gato, Le mythe de Saint-Pétersbourg.
- Lieven 2006, p. 29.
- Lieven 2006, p. 20.
- Lieven 2006, p. 78.
- Lieven 2006, p. 79.
- Natalia Smirnova, Saint-Pétersbourg ou l'enlèvement d'Europe, Éditions Olizane, , p. 63.
- Lieven 2006, p. 21.
- Lieven 2006, p. 94.
- Selon le Grand Atlas pour le XXIe, édition Le Soir, p. 128-129.
- Lieven 2006, p. 22.
- Suny 2006, p. 10.
- Suny 2006, p. 250.
- Suny 2006, p. 19.
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