Belfort (/bɛl.fɔʁ/ ) est une commune française située dans le département du Territoire de Belfort, la région culturelle et historique de Franche-Comté et la région administrative Bourgogne-Franche-Comté.
Chef-lieu du Territoire de Belfort, la commune comptait 45 155 habitants en 2021
Elle est la principale commune et le cœur urbain d'une agglomération de 77 432 habitants.
Établie dans la trouée de Belfort, la cité est implantée sur une importante voie de communication où les premières activités humaines se manifestent dès la Préhistoire
Cet emplacement particulier joue un rôle important tout au long de son histoire, notamment au XIVe siècle, quand la cité est connue sous le nom de Bellumfortum
Cette situation stratégique a fait d'elle une place forte militaire et une cité de garnison aux frontières des mondes rhénan et rhodanien
Sa résistance lors de trois sièges (1814, 1815 et 1870-1871) d'envahisseurs lui acquiert une réputation de citadelle imprenable, immortalisée plus tard par le Lion de Bartholdi.
Historiquement, Belfort fait partie de la Haute-Alsace, subdivision de la province historique d'Alsace qui correspond aux actuels départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et du Territoire de Belfort ainsi que le territoire de Landau en Allemagne
Mais après le rattachement de l'Alsace-Lorraine à l'Empire allemand en 1871, l'actuel Territoire de Belfort, alors dénommé « arrondissement subsistant du Haut-Rhin », seule partie d'Alsace à n'avoir pas été rattachée, demeure détaché puis accède au statut de département en 1922
Le décret du 2 juin 1960 portant harmonisation des circonscriptions administratives le rattache à la région Franche-Comté plutôt qu'à la région Alsace, décision confirmée par les lois de décentralisation en 1982.
L’économie belfortaine, dynamisée à partir de la fin du XIXe siècle par l’industrie d’origine alsacienne (SACM puis Alsthom puis Alstom, DMC), s’oriente aujourd’hui davantage vers le secteur tertiaire incarné par le parc d’activités du Techn'hom, lui-même issu de la zone industrielle réhabilitée
Les manifestations culturelles comme les Eurockéennes et le FIMU participent également à son rayonnement.
Géographie
Les limites communales de Belfort et celles de ses communes adjacentes.
Localisation
Article connexe : géographie du Territoire de Belfort.
Représentations cartographiques de la commune
Mairie
1 : carte dynamique ; 2. carte OpenStreetMap ; 3 : carte topographique
La ville se situe dans la trouée de Belfort, voie de passage entre les Vosges au nord et le Jura au sud. Belfort est ainsi aux portes tant du monde rhénan que du monde rhodanien et est desservie par l'autoroute A36, la route nationale N 19, les voies ferrées Belfort-Delle, Paris-Mulhouse, Strasbourg-Lyon, Dole-Ville-Belfort et la LGV Rhin-Rhône, ainsi que par le canal de la Haute-Saône reliant la ville au canal du Rhône au Rhin.
La ville de Belfort se situe dans l'extrême nord-est de la région Bourgogne-Franche-Comté, dans le département du Territoire de Belfort. L'agglomération belfortaine se situe ainsi, par la route, à moins de 25 suisse et à environ 60 allemande. La ville est proche de Bâle et Fribourg-en-Brisgau.
À vol d'oiseau, Belfort est distante de 360 Paris, 260 Lyon et 120 Strasbourg.
À l'échelle régionale et par les voies de communication, Belfort est à 20 Montbéliard, 44 Mulhouse, 68 Colmar, 90 Besançon, 95 Dijon et 178 Nancy, aux portes de l'Alsace, de la Lorraine, de l'Allemagne et de la Suisse. Sa distance avec la capitale est de 500 .
La ville se situe sur un axe structurant européen dit « Rhin-Rhône », voie de communication entre Mer du Nord et Méditerranée, Europe du Nord et Europe du Sud.
Communes limitrophes
Communes limitrophes de Belfort
Évette-Salbert
Valdoie
Offemont, Denney
Essert, Cravanche
Pérouse
Bavilliers
Danjoutin
Vézelois
Topographie
La trouée de Belfort est le passage le plus aisé entre la plaine d'Alsace et le bassin du Rhône. Le site de la ville est entouré de plusieurs collines (de l'est au nord dans le sens des aiguilles d'une montre) : le mont de la Miotte, le mont Justice, le mont des Basses Perches, le Haut du Mont et le mont Salbert. Le mont Rudolphe sur la commune d'Offemont est limitrophe de la ville. Les monts de la Miotte, du Salbert, des Hautes et Basses Perches et Rudolphe sont des sites fortifiés. Les terres sur lesquelles Belfort est bâti aujourd'hui sont relativement planes, d'une altitude variant entre 345 et 400 mètres.
Belfort vue de la Miotte, de nuit.
Belfort vue de la Miotte, de jour.
Panorama vu du sommet du Salbert.
Géologie
La ville présente une situation notable d'un point de vue géologique, puisqu'elle est située à cheval sur le sud du massif des Vosges (mont du Salbert) et sur le nord du massif du Jura (monts de la Justice, de la Miotte, des hautes et basses Perches). Elle se situe à l'extrémité sud de la faille géologique du fossé rhénan. Les sols de la ville sont constitués de roches issues de ces massifs : le grès des Vosges, datant du Trias moyen et les calcaires jurassiens du Jurassique. Le bassin houiller stéphanien sous-vosgien s’étend au nord du territoire communal, où il est brièvement exploité de façon artisanale à Anjoutey et Roppe. Le gisement s'étend entre Bouhans-lès-Lure, Ronchamp, Lomont à l'ouest, Thann au nord et Mulhouse à l'est, il est recouvert d'un Permien épais. Des alluvions plus récentes ont été déposées par les cours d'eau dont la Savoureuse sur un axe nord-sud large de plus de 1 Valdoie et Danjoutin. Au nord de la ville, on trouve des dépôts glaciaires du quaternaire et des strates issues du Viséen et Dévono-Dinatien,. Une des conséquences de cette situation particulière est la couleur de la roche et donc de la terre. Ainsi à l'ouest de l'étang des Forges, elle est rouge (grès des Vosges), alors qu'à l'est, elle est grise (calcaire du Jura).
Hydrographie
Article connexe : Savoureuse.
L'axe hydrologique principal de la ville est constitué par la Savoureuse. Cette rivière de 40 kilomètres prend sa source au sommet du ballon d'Alsace et traverse la ville du nord au sud ; elle se jette dans l'Allan à Sochaux dans le Doubs. Dans sa traversée du centre-ville, les quais ont été aménagés pour permettre aux cyclistes et piétons de s'y promener. La ville se situe à quelques kilomètres de la ligne de partage des eaux entre la mer Méditerranée et la mer du Nord.
Climat
Pour des articles plus généraux, voir Climat de la Bourgogne-Franche-Comté et Climat du Territoire de Belfort.
En 2010, le climat de la commune est de type climat des marges montargnardes, selon une étude du Centre national de la recherche scientifique s'appuyant sur une série de données couvrant la période 1971-2000. En 2020, Météo-France publie une typologie des climats de la France métropolitaine dans laquelle la commune est exposée à un climat semi-continental et est dans la région climatique Vosges, caractérisée par une pluviométrie très élevée (1 500 à 2 000 .
Pour la période 1971-2000, la température annuelle moyenne est de 9,8 amplitude thermique annuelle de 17,3 . Pour la période 1991-2020, la température moyenne annuelle observée sur la station météorologique de Météo-France la plus proche, « Dorans », sur la commune de Dorans à 6 vol d'oiseau, est de 10,9 °C et le cumul annuel moyen de précipitations est de 974,0 mm.
La température maximale relevée sur cette station est de 38,1 ,,.
Statistiques 1991-2020 et records DORANS (90) - alt : 401m, lat : 47°35'30"N, lon : 6°50'13"E Records établis sur la période du 01-04-2009 au 04-01-2024
Mois
jan.
fév.
mars
avril
mai
juin
jui.
août
sep.
oct.
nov.
déc.
année
Température minimale moyenne (°C)
−0,2
−0,3
2,3
5,5
8,7
12,6
14,4
14,1
10,7
7,1
3,6
0,6
6,6
Température moyenne (°C)
2,2
2,9
6,8
10,8
13,8
18
20,1
19,7
15,9
11,1
6,6
3,3
10,9
Température maximale moyenne (°C)
4,6
6,2
11,3
16,1
19
23,4
25,8
25,4
21,2
15,2
9,6
6,1
15,3
Record de froid (°C) date du record
−11 07.01.17
−13,8 05.02.12
−7,5 01.03.18
−3,7 06.04.21
−1,3 06.05.19
5,2 21.06.10
7,2 03.07.11
6,4 30.08.09
2,8 20.09.12
−3,7 29.10.12
−8,7 30.11.10
−16 20.12.09
−16 2009
Record de chaleur (°C) date du record
18,4 01.01.23
21,4 24.02.21
25,2 31.03.21
27,7 21.04.18
32 25.05.09
35 19.06.22
38,1 24.07.19
37,8 07.08.15
33,4 11.09.23
29,5 02.10.23
23,1 07.11.15
16,8 24.12.13
38,1 2019
Précipitations (mm)
94,5
71
66,1
66,3
97,8
82,5
70,3
87,1
60,1
79,4
84,1
114,8
974
Source : « », sur donneespubliques.meteofrance.fr, edité le : 06/01/2024 dans l'état de la base
Diagramme climatique
J
F
M
A
M
J
J
A
S
O
N
D
4,6
−0,2
94,5
6,2
−0,3
71
11,3
2,3
66,1
16,1
5,5
66,3
19
8,7
97,8
23,4
12,6
82,5
25,8
14,4
70,3
25,4
14,1
87,1
21,2
10,7
60,1
15,2
7,1
79,4
9,6
3,6
84,1
6,1
0,6
114,8
Moyennes : • Temp. maxi et mini °C • Précipitation mm
Les paramètres climatiques de la commune ont été estimés pour le milieu du siècle (2041-2070) selon différents scénarios d'émission de gaz à effet de serre à partir des nouvelles projections climatiques de référence DRIAS-2020. Elles sont consultables sur un site dédié publié par Météo-France en novembre 2022.
↑ « », sur geoportail.fr (consulté le ).
↑ Erreur de référence : Balise <ref> incorrecte : aucun texte n’a été fourni pour les références nommées metropolerhinrhone
↑ « La Houille dans le Territoire », L'Alsace, .
↑ « », sur artic.ac-besancon.fr (consulté le ).
↑ « », sur le site du service d'administration nationale des données et référentiels sur l'eau (SANDRE), (consulté le ).
↑ a et bDaniel Joly, Thierry Brossard, Hervé Cardot, Jean Cavailhes, Mohamed Hilal et Pierre Wavresky, « Les types de climats en France, une construction spatiale », Cybergéo, revue européenne de géographie - European Journal of Geography, ISSN 1278-3366, DOI 10.4000/cybergeo.23155, lire en ligne, consulté le )
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↑ « », sur meteofrance.com, (consulté le ).
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Toponymie
Le nom de la ville se prononce [] bien que la prononciation vieillie ait été [] ou [].
Schmittlein identifie l'attestation in pago Pefferauga, de 972, avec le pays de Belfort. Ce nom est composé de Beffert, nom de personne germanique, et du germanique awa, "eau, cours d'eau" puis "prairie humide".
Dès le XIIIè siècle, le nom n'est plus compris et, après disparition de la finale inaccentuée awa, est réinterprété en français, Bellus Fortis, "beau (château) fort", d'où l'appellation in castro de Belfort de 1226. En haut allemand, le français fort est compris furt, "gué", d'où le nom gen Bechfurt en 1338.
Le nom de la localité est attesté sous les formes [In castro de] Belfort (1226), [Castrum meum] Bellofortem (1228), [Mag. Willelmus de] Belloforti [clericus] (1284), Biafort (1303), [Ad ecclesiam de] Belloforti / [ecclesie] Bellifortis (1342), [Sloss / Statt und herrschafft] Beffort (1492), Befurt (1644), Belfort (1659).
Une des premières mentions écrites de la ville date de 1228, dans le Traité de Grandvillars, sous la forme latinisée Bellumfortum ou française Belfort en 1226. Il s'agit d'un composé fréquent des éléments Bel- « beau » et -fort, « forteresse », qui désigne généralement un « château fort » cf. Beaufort.
↑ Jean-Marie Pierret, Phonétique historique du français et notions de phonétique générale, Peeters, Louvain-la-Neuve, 1994, p. 104.
↑ R. Schmittlein, « Une mention ancienne du nom de Belfort », Revue internationale d'onomastique, lire en ligne)
↑ Pierre-Henri Billy, Dictionnaire des noms de lieux de la France, éditions errance, , 639 ISBN ), p. 114
↑ Albert Dauzat et Charles Rostaing, Dictionnaire étymologique des noms de lieu en France, Paris, Librairie Guénégaud, (ISBN ), p. 62a et b sous Beaufort.
↑ Albert Dauzat et Charles Rostaing, Op. cit.
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Histoire
Article connexe : histoire du Territoire de Belfort.
L'histoire de la ville est une composante essentielle de l'histoire du Territoire de Belfort. Le site du territoire est occupé depuis le Paléolithique. Cependant aucune place notable ne sera visible avant le haut Moyen Âge. La ville a toujours été un point de contact entre le monde rhénan et le monde roman et le territoire qu'elle occupe porte, à juste titre, le nom de Porte de Bourgogne et Porte d'Alsace.
Premières occupations du site
Dès la Préhistoire, le site de Belfort est occupé. Les premières traces d'activités humaines remontent au paléolithique, des éclats de silex datant de 150 000 ans, ont été mis au jour, ce qui correspond à l'époque de l'Homme de Néandertal. Quelques outils datant de Cro-magnon ont été retrouvés. Au mésolithique, la présence de l'Homme moderne est plus évidente et les sites se diversifient. Au néolithique, 21 villages sont recensés à proximité de Belfort. Le site des grottes de Cravanche, commune quasi-enclavée dans Belfort, a été révélé en 1876. Il s'agit de l'un des sites locaux les plus remarquables d'où de nombreux objets et squelettes ont été extraits. Ils sont aujourd'hui exposés au Musée d'Histoire et d'Archéologie de Belfort.
Antiquité
Avant la conquête romaine en 58 av. J.-C., la partie est du Territoire de Belfort faisait partie de la Rauracie, le pays des Rauraques, dont le siège était Augusta-Rauracorum (Augst, près de Bâle) puis Bâle, tandis que la partie ouest, dont Belfort et d'autres localités, appartenaient à la Séquanie. En 58 av. J.-C., Arioviste et ses Germains, qui dominaient la région, ont été battus en un lieu que les historiens ne parviennent pas à situer, malgré la description qu’en fait Jules César dans ses Commentaires sur la guerre des Gaules. Ce pourrait être dans la plaine occupée par Belfort. Sous la domination romaine, la trouée de Belfort, lieu de passage entre le bassin du Rhône et la vallée du Rhin, est traversée par deux voies romaines importantes. La voie la plus au sud passe par Mandeure, Delle, Florimont en direction du Rhin, tandis que la plus au nord (Langres-Strasbourg) serpente au pied des Vosges. Des chemins secondaires quadrillent l’actuel Territoire de Belfort et l’un d’eux relie Mandeure, Bavilliers, Belfort, Offemont et rejoint la voie Langres-Strasbourg vers Rougemont-le-Château. Des villas romaines ont été construites à Offemont et à Bavilliers. Des mosaïques et poteries issues de la Villa de Bavilliers sont exposées au Musée d'Histoire et d'Archéologie de la ville.
Moyen Âge
Des grandes invasions au comté de Montbéliard
Pendant la période des invasions barbares, de 250 à 500 environ, la région de Belfort voit s'installer de nombreux Germains de diverses origines comme le montre la toponymie : Francs, Vandales, Alamans, Burgondes. Ils se romanisent rapidement. Le sud de l’Alsace, espace frontière entre les royaumes burgonde et alaman, ne connut guère la tranquillité avant que Charlemagne ne restaure l’ordre qui avait disparu avec l’Empire romain.
Lors de la dissolution de l'Empire carolingien entériné par le traité de Verdun en 843, hérite de Belfort et gouverne la Francie médiane. Par le traité de Prüm en 855, la Francie médiane est à son tour dissoute et Belfort échoit cette fois-ci à Lothaire II en tant qu'extrémité sud de la Lotharingie. Le traité de Meerssen en 870 éclate la Lotharingie et l'Alsace dont fait alors partie Belfort qui passe sous l'autorité de Louis II de Germanie puis son fils Louis III de Germanie. Le partage suivant est décrété par le traité de Ribemont en 880 où Charles III le Gros obtient, en récompense de son soutien à son frère Louis III de Germanie contre les héritiers de Louis II de France, des droits sur des terres vosgiennes aux confins de l'Alsace dont Belfort et une partie de la dignité régalienne en Lotharingie. À la suite de la déchéance de Charles III le Gros, l'Alsace (dont Belfort) est intégrée au royaume de France jusqu'à ce qu'Henri l'Oiseleur, roi de Germanie, la reprenne en 923. En 1042, l'empereur germanique Conrad II le Salique fonde le comté de Montbéliard et le donne à son vassal Louis de Mousson et de Bar qui devient le premier comte de Montbéliard d'Altkirch et de Ferrette. À la mort de son fils de Montbéliard en 1105, le comté revient à Thierry II et le comté de Ferrette et d'Altkirch à de Ferrette.
Le traité de Grandvillars et la charte d'affranchissement de la ville
La première mention du château de Belfort a été faite dans le traité de Grandvillars, le . Le traité avait pour but de régler un conflit de territoire entre Richard III de Montfaucon et de Ferrette. Le château de Belfort est un relais du pouvoir des comtes de Montbéliard et devient progressivement un centre de gravité d'autres seigneuries environnantes, l'ensemble est alors nommé « Terre de Belfort ». En , le petit-fils de Richard III, Renaud de Bourgogne, comte de Belfort affranchit la ville de toute corvée et tout servage. L'ensemble est consigné dans la charte de mai 1307. Les lettres d'affranchissement sont cher payées par les habitants du bourg : 1 000 livres estèvenantes, sachant qu'un cheval à l'époque en coûtait 6. Cependant cette franchise ne s'accorde qu'à un espace précis : le château, le bourg et la ville et aux seules personnes présentes lors de la remise de la charte et à ceux que les Belfortains accepteront dans leur communauté. Cela exclut les autres territoires de la « Terre de Belfort » et les paysans qui y sont rattachés. Elle prévoit également un conseil de neuf membres, le « Conseil des Neuf », à qui est confié le gouvernement et le pouvoir judiciaire. Cette « zone franche » nouvellement créée a une incidence sur le développement de la ville. Artisans, marchands ou hommes de tout corps de métier affluent et s'installent en ville. Bien que leurs origines soient incertaines, ils semblent venir de régions assez proches à l'exception du comté de Montbéliard, clause de la charte. La seule exception fut un affranchissement d'un couple par Alix, marquise de Bade en 1362. La grande épidémie de peste noire, qui frappe l'Europe de 1347 à 1349, touche également les campagnes environnantes, réduit d'un tiers le nombre de serfs environnants et accentue l'essor relatif de Belfort. En 1342, l'église de Saint-Denis est transformée en collégiale de 12 chanoines de 8 prêtres et 4 clercs. Ces douze lettrés donnent une réelle stature institutionnelle à la ville malgré sa petitesse.
Possession autrichienne des Habsbourg
La ville devient par la suite une possession autrichienne. Alix (marquise de Bade) qui a hérité du château après la mort de sa mère, Jeanne de Montbéliard en 1350, lègue son héritage en 1373 ou 1375 à son neveu Léopold III de Habsbourg qui devient alors seigneur de la ville. En pleine guerre de Cent Ans, Philippe III de Bourgogne dit Philippe le Bon, cherche une entrée dans le Nord Franche-Comté pour faire diversion et reprendre la Lorraine. Antoine de Vergy, alors maréchal de France, engage une attaque avec 4 000 soldats contre Belfort. L'armée met la ville à feu et à sang en juin-juillet 1431. La paix sera retrouvée pour deux ans grâce à la médiation des clercs de Bâle, alors ville de la chrétienté très active, mais les tensions restent vivaces avec les Bourguignons. En 1433, la ville subit plusieurs violentes attaques bourguignonnes. Cependant la ville se positionne dans un réseau de communication liée à l'Autriche et jouit aussi de la solidarité des seigneuries locales telles que celles de Thann, Delle, Masevaux, Altkirch et Ferrette à la suite de l'appel de Jean Fouquet de Soppe, bailli de la ville pour la maison d'Autriche. Des travaux de renforcement des défenses sont aussi engagés ce qu'il lui permet de résister aux attaques. La menace pèse toujours et pousse l'Autriche à fédérer ses quinze villes alsaciennes en unissant les bourgeois des villes et les chevaliers nobles. L'« Union des bonnes villes » est scellée le 20 août 1433 par la fondation de deux ordres : le Landschaft ou « Communauté de pays », et la Société de l'écu de Saint-Georges. Il s'agit d'une première volonté des gouvernés d'être associés à la vie politique les concernant. En 1435, la paix d'Arras est signée entre Charles VII (roi de France) et Philippe le Bon et minimisent provisoirement la menace bourguignonne. Les assemblées entre villes et chevalerie deviennent de plus en plus fréquentes. En 1436, le Landtag ou diète se réunit régulièrement et intégrera les prélats, le corps religieux. Entre 1439 et 1445, les Écorcheurs de Charles VII de France, conduits par le Dauphin de France, Louis XI, ravagent l'Alsace. La ville est occupée. Les Bourguignons (1424 à 1431), puis les confédérés suisses (1468) feront encore de nouvelles intrusions dans la Porte d'Alsace.
En 1469, les Habsbourg et le duché de Bourgogne concluent le traité de Saint-Omer qui mentionnent l’abandon des territoires de la Haute-Alsace (dont fait partie Belfort) et de la Forêt-Noire contre une certaine somme d’argent de la part des Bourguignons. Ce rattachement n'est que provisoire puisque la Haute-Alsace est rachetée, contre 76 000 florins, par les villes de la « ligue alémanique » (Berne, Bâle, Strasbourg, et Mulhouse) au duc de Bourgogne, Charles le Téméraire, à l'occasion de la signature du « traité de Basse-Union », le 4 avril 1474. Quelques mois plus tard, la guerre de Bourgogne éclate et précipite la fin du duché et de l'État de Bourgogne en 1477, confirmant ainsi la domination de la maison des Habsbourg sur Belfort et l'Alsace.
Époque moderne
Conséquences de la Réforme luthérienne
En 1525 éclate la guerre des Paysans en Allemagne qui s'étendra jusqu'aux marges du Saint Empire. À la suite des idées véhiculées par le réformateur de l'Église Martin Luther, les paysans se révoltent, le 16 avril, partout en Alsace, forcent et pillent les monastères. La bande de Chaux dirigée par Jean André est constituée de quelques milliers d'hommes. Elle se dirige vers Belfort pour rattacher les habitants à leur cause et pour rançonner les chanoines. Alors que les autres bandes dans le reste de l'Alsace sont réprimées, un accord entre Jean André et les Belfortains est conclu le 25 mai. Les pourparlers engagés par la suite entre paysans et nobles ne sont qu'une diversion de la noblesse pour apaiser la contestation. Jean André de Chaux, qui avait fui dans les Vosges, est arrêté, jugé et décapité en 1527. Ainsi au Huguenots cherchant refuge auprès des princes allemands acquis à la Réforme protestante ainsi que des mercenaires engagés dans les guerres de Religion. En 1552, Henri II soutient les princes allemands face à l'empereur Charles Quint et prend des positions dans l'espace Lorrain, notamment Metz, Toul ou encore Verdun. L'Autriche décide alors d'asseoir son autorité sur Belfort, placée en position stratégique pour contrer le monarque français. Les Habsbourg installent alors Jean-Ulrich de Stadion et l'élèvent au titre de Grand Bailli en 1563 en rachetant le gage au seigneur de Morimont. La cité est donc directement administrée par l'Autriche. En 1619, l'archiduc Léopold V d'Autriche-Tyrol fait construire le couvent des Capucins.
Guerre de Trente Ans
Les tensions entre catholiques et protestants qui renaissent en Bohême plongent l'Europe dans la Guerre de Trente Ans. Les armées suédoises viennent prêter main-forte aux princes allemands protestants et pénètrent en Alsace pendant l'été 1632. Les villes alsaciennes sous autorité des Habsbourg tombent une à une. Belfort capitule sans combattre le .
En , l'armée espagnole du duc de Feria occupe Belfort, au soulagement des habitants catholiques. Le , elle est reprise sans grande résistance par le rhingrave Otton-Louis pour les protestants ; le château se rend après quelques coups de canon.
À la suite de la défaite suédoise à Nördlingen, la Suède ne peut plus tenir ses positions en Haute-Alsace. Le traité de Paris, signé le
Devenu seigneur de Belfort, Gaspard de Champagne érige une fortification moderne, pour l’époque, permettant de protéger le Château par la construction d’un couronné composé de deux bastions, d’un demi bastion et d’une demi-lune. Cet ensemble est appelé par la suite « Couronné du Comte de la Suze ».Il fait réparer l’enceinte, rétablir l’exercice des foires et marchés et réparer les routes et les ponts. Il développe la métallurgie au sud de la ville historique dans le quartier nommé depuis le Fourneau.
En 1648, le Traité de Westphalie met fin aux hostilités. Belfort devient une ville française. En 1651, Gaspard de Champagne rejoint Condé et la Fronde. Finalement c'est le marquis Henri de La Ferté-Senneterre qui reprendra la ville le 23 février 1654 au nom du roi de France. En décembre 1659, le roi offre Belfort au cardinal Mazarin, dont sa nièce Hortense Mancini hérite deux ans plus tard. La cité est alors pleinement intégrée au royaume de France, tandis que Montbéliard reste une enclave des ducs de Wurtemberg et le reste de la Franche-Comté, espagnol.
Belfort, promue capitale du duché de Mazarin
Louis XIV alors qu'il séjourne à Toulouse pour préparer son mariage avec l'infante d'Espagne en décembre 1659 signe une lettre de donation du comté de Ferrette et des seigneuries de Belfort, Thann, Altkirch et Issenheim : elle offre une partie essentielle des seigneuries alsaciennes du Sundgau, récemment prises aux Habsbourg, à son Premier ministre, le cardinal Mazarin, habile négociateur des traités de Westphalie. Peu avant sa mort le 9 mars 1661, le cardinal lègue cette principauté alsacienne à sa nièce Hortense Mancini le jour de son mariage le Charles-Armand, duc de la Meilleraye, marquis de la Porte, prenne désormais le patronyme de Mazarin et la dénomination noble de "duc de Mazarin".
L'intendant de la province, Charles Colbert de Croissy, nommé par Mazarin, a déjà restructuré le legs du cardinal. En cinq voyages entre 1661 et 1672, le nouveau duc de Mazarin organise la gestion des biens et droits multiples, d'autant plus facilement que la Régence d'Ensisheim est placée désormais sous la tutelle souveraine des princes d'Alsace méridionale. Le duc Charles-Armand, dévot brouillé avec son épouse après 1667, vit solitaire dans ses terres bretonnes pendant plus de trente ans. Ensuite, les héritiers du couple qui vivent à la cour ou à Paris, délaissent leurs terres du Sundgau confiées à une multitude d'intendants et de représentants, à l'exception de deux grands voyages inauguraux entre 1713 et 1789.
Entre 1665 et 1682, Belfort est choisie comme centre d'une subdélégation, dépendante de l'intendance d'Alsace.
Belfort, forteresse royale et place de guerre, fortifications de Vauban
Quand Vauban découvre Belfort en juin 1675, il donne une description négative de la villotte de cent vingt deux maisons et du château qu'il découvre. Louis XIV l'a missionné pour établir une ceinture de fer sur les frontières du royaume de France. La nécessité première de Vauban est d'agrandir la ville et de la fortifier pour empêcher des possibles incursions allemandes. Il revient par deux fois à Belfort en 1677 et en 1679 avec le ministre de Guerre Louvois pour organiser le pré carré. En juin 1686, la Ligue d'Augsbourg se crée pour contrer les aspirations annexionnistes du Roi de France. Le grand projet de fortification de Belfort devient une priorité et Vauban s'attèle à la tâche en accélérant les travaux en 1687. Les aménagements gigantesques entrepris, tels que la fortification de la ville en pentagone avec des tours bastionnées, la déviation du canal, dureront jusqu'en 1703.
Essor de la ville et fin conflictuelle de l'ancien régime
Le visage de Belfort a totalement changé en quinze ans, la cité a doublé de taille et la population passe de 1 200 à 4 000 habitants. La garnison de plus de 2 500 hommes constitue la majeure partie de la population.
Mais la ville, siège d'une délégation permanente d'Alsace, s'affirme progressivement comme un important centre administratif.François Noblat occupe l'accaparante fonction de subdélégué de 1715 à 1752. Il laisse la charge à celui qui l'a secondé, son neveu François-Bernardin Noblat, en poste jusqu'en 1770.
Autrefois, la grande ville locale était Montbéliard, mais, après une brève conquête par l'armée de Louis XIV, elle est demeurée sous l'égide de sa principauté allemande d'origine. Elle se retrouve logiquement délaissée par l'administration royale et les grandes routes traversant la région vont se croiser au seuil stratégique de Belfort. De ce nouveau nœud routier partent les routes vers Paris, Remiremont, Colmar, mais aussi la ville-république de Mulhouse, Bâle et Porrentruy en Suisse, Montbéliard dans le duché de Wurtemberg.
Par ses prérogatives administratives, judiciaires et militaires, Belfort s'impose au milieu du Lepuix est prolongée par les ingénieurs des Ponts et Chaussées du Roi entre 1753 et 1760 vers le Ballon d'Alsace.
Une des deux pépinières royales d'Alsace est implantée à Belfort, elle fournit des arbres d'alignement et des arbres fruitiers pour les vergers.
En 1719, certaines prérogatives de la charte de 1307 sont rétablies, notamment l'élection du « Conseil des Neuf », mais au lieu d'être renouvelés tous les ans, les conseillers sont élus à vie. Des protestations éclatent et conduisent à l'expulsion de deux conseillers hors de la ville. Ces enjeux politiques sont par la suite davantage des rivalités entre grandes familles de la ville, telles les Antonin, Viellard ou Migeon. Cette oligarchie bourgeoise est parfois plus riche que la noblesse environnante ce qui entraîne des conflits d'intérêts entre la représentation municipale du « Conseil des Neuf » et la représentation ducale, le prévôt François-Bernardin Noblat.
Par le jeu des héritages et descendances, le duché de Mazarin se retrouve en 1777 sous l'autorité de Louise d'Aumont, duchesse de Valentinois par son mariage avec Honoré Grimaldi, duc de Valentinois, prince héréditaire de Monaco. Leur train de vie les pousse à prélever davantage de taxes au comté de Belfort pour faire face à leur endettement. Cette tutelle est difficilement supportable par les Belfortains qui engagent des avocats pour se défendre. Les procès durent jusqu'en 1788.
La donation au cardinal Mazarin, sur proposition d'un rapport soumis le 17 juillet 1791 à l'Assemblée nationale par le député de Saône-et-Loire Jean-Baptiste Geoffroy, est annulée le 25 juillet 1791, au moment des événements révolutionnaires au nom de la souveraineté nationale.
Époque contemporaine (1789-1914)
Des événements révolutionnaires de 1789 aux guerres de la Révolution de 1792
Les idées de la Révolution française gagnent Belfort. Un cercle de personnalités locales et régionales se crée avec Jean-Baptiste Kléber, son demi-frère Burger, les familles Parisot, Strolz, Antonin et Felemez. Kléber participe activement à la rédaction des cahiers de doléances du comté de Belfort. De ce fait, lui et le chanoine Lubert poussent Marc David Lavie à représenter le comté à l'Assemblée constituante en tant que député du Tiers état. La Grande Peur, qui s'est propagée en France lors de l'été 1789, n'atteint guère Belfort, car la ville n'était pas assez rurale pour connaître les émeutes paysannes et pas assez citadine pour générer un mouvement de sans-culottes important. Lors de la création des départements, le 26 février 1790, Belfort devient chef-lieu de district du département du Haut-Rhin. Le 21 octobre de la même année, l'affaire de Belfort éclate, scandale dû à quelques soldats du régiment de Lauzun et du Royal-Liégeois. Une quinzaine d'officiers royalistes tentent d'entrer dans l'hôtel de ville. Kléber disperse les trouble-fêtes.
Le contexte de guerre opposant la France révolutionnaire face aux puissances monarchiques européennes, dont l'Autriche, inquiète les Belfortains. Les troupes ennemies se massent à la frontière du Rhin. Des doutes se lèvent sur la neutralité affichée de Frédéric-Eugène, duc de Wurtemberg et prince de Montbéliard. Sous impulsion du conseil municipal, un détachement de troupes de la garnison et la garde nationale de Belfort, deux canons, rejoints par 150 hommes de la garde nationale d'Héricourt se réunissent. Plus de 5 000 hommes se massent devant Montbéliard qui se rend sans combattre, étonné d'une telle incursion, étant donné la position pacifique du prince. Cependant cette entreprise locale est désavouée par deux commissaires du Haut-Rhin. En effet cette agression pourrait avoir des conséquences diplomatiques lourdes, le duché de Wurtemberg pourrait rejoindre activement la coalition monarchique liée contre la France. Or la victoire française à Valmy le 20 septembre 1792 évite à Belfort d'être sanctionnée et permet aux idées de la Révolution de gagner les Montbéliardais.
Belfort sous le Premier Empire
Au début du Consulat en 1800, Belfort est une sous-préfecture du Haut-Rhin. La défaite de l'Empire napoléonien à Leipzig entraîne l'occupation de Belfort, due à sa position de voie de communication. Le 24 décembre 1813, l'armée bavaroise s'installe devant la cité, elle est rejointe par des Autrichiens, des Cosaques et des Hongrois. Le siège est le plus long et un des plus durs que la ville ait connus, 113 jours sans ravitaillement. Le commandant Jean Legrand qui défend la ville se rend le 12 avril 1814. La ville est alors occupée par les armées autrichiennes jusqu'en juin 1814. En mars 1815, s'échappe de l'île d'Elbe et reprend temporairement le pouvoir en France, la défense du Rhin est confiée au général Claude Jacques Lecourbe. Face aux armées autrichiennes, il résiste pendant 15 jours, du 27 juin au 8 juillet 1815. La défaite de Napoléon à Waterloo entraîne la cessation des hostilités à Belfort qui n'a subi que de faibles dégâts. La ville évite ainsi une nouvelle occupation.
Nouvelles fortifications de Belfort sous la Restauration et la monarchie de Juillet
En 1822, un complot, qui part de Belfort, vise à détrôner le roi Louis XVIII ; cette tentative avorte. Le général François Nicolas Benoît Haxo est chargé de fortifier les défenses de la frontière dont Belfort. Il réalise le camp retranché aux monts de la Justice et de la Miotte. Les travaux du fort de la Justice commencent en 1826 et ceux du fort de la Miotte en 1831 après la venue du roi à Belfort. Haxo renforce également la citadelle en créant des enceintes supplémentaires élargissant de fait la place forte de la cité. Il remplace l'ancienne caserne construite par Vauban par une nouvelle à l'épreuve des bombes. Ces aménagements font appel à une importante main d'œuvre pendant les vingt années que durent les travaux, entraînant une augmentation de population d'un millier d'âmes qui stimule le commerce. Ce nouvel essor décline lors de l'épidémie de choléra subie par la cité en 1832. La ville reste une sous-préfecture et le premier Journal hebdomadaire de la ville et de l'arrondissement de Belfort est publié en 1831. Bien que ce journal soit apolitique, il reflète l'intérêt des Belfortains pour la vie politique. Les libéraux modérés dominent la ville et sont partisans de la monarchie constitutionnelle.
Second Empire et Siège de Belfort de 1870-1871
Article connexe : Siège de Belfort (1870-1871).
La République est proclamée deux jours après la défaite de l'empereur Napoléon III à Sedan le 2 septembre 1870. Le Colonel Pierre Philippe Denfert-Rochereau est alors nommé par le ministre de la Guerre Léon Gambetta, commandant de Belfort, le 17 octobre 1870. Les deux hommes croient en une possible victoire face à la Prusse et poussent la résistance à outrance. Les armées du général Udo von Tresckow encerclent la ville dès le 4 novembre et le 3 décembre tirent les premiers obus. Avec une garnison de 15 000 hommes Denfert-Rochereau doit résister à 40 000 Allemands. Au lieu de s'enfermer dans la place, il en dispute toutes les approches. Cette lente retraite vers le réduit prend un mois. L'ennemi a mis en batterie 200 gros canons qui, pendant 83 jours consécutifs, tirent plus de 400 000 obus, soit 5 000 obus par jour. Mais la résistance ne fléchit pas. Le 28 janvier 1871, Paris capitule et la convention d'armistice est arrêtée entre Otto von Bismarck et Jules Favre, ministre des affaires étrangères du gouvernement de la Défense nationale. Cependant Denfert-Rochereau poursuit la résistance malgré les morts, le manque de ravitaillement et les maladies, tel le typhus. Après 103 jours de siège, sur ordre formel du gouvernement, le colonel Denfert-Rochereau consent à quitter Belfort le 18 février 1871 avec sa troupe. Plus de 100 000 projectiles ont été lancés, laissant la ville dévastée. Avec le traité de Francfort négocié entre Otto von Bismarck, alors chancelier de l'empereur d'Allemagne et Adolphe Thiers, chef du pouvoir exécutif français (il devient président de la République française fin août 1871), le 10 mai 1871, la majeure partie de l'Alsace et une partie de la Lorraine sont rattachées à l'Empire allemand. Belfort ayant été invaincue, Bismarck consent à ce que seul l'arrondissement de Belfort, situé alors dans le département du Haut-Rhin, reste français. Les Allemands ne quitteront la ville que le 2 août 1873, après paiement de la totalité de l'indemnité de guerre.
On fait de Belfort le chef-lieu d'un territoire, minuscule, mais dont l'importance économique va devenir considérable. Un préfet est nommé dès le 14 mai, faisant du Territoire de Belfort un département de facto.
De la naissance du Belfort moderne à l'aube de la Première Guerre mondiale
Les Prussiens quittent la ville le 2 août 1873 et, un an après, on entreprend la construction des forts du Système Séré de Rivières, dont le fort du Salbert, autour de la place fortifiée de Belfort. Ils seront achevés vers 1885. En 1875, Bartholdi s'attèle à la réalisation du Lion de Belfort qui symbolise la résistance de la ville pendant le siège de la ville en 1870-1871. Son œuvre sera achevée en 1879.
La ville connaît une hausse significative de sa population grâce à l'arrivée d'immigrés alsaciens dont la plupart suivent les activités économiques déplacées pour conserver leur accès au marché français, quelques-uns, plus rares, refusant l'annexion. Jusqu'en 1870, Belfort était moins peuplée que Thann ou Luxeuil. De 1870 à 1914, la population passe de 8 000 à 34 000 habitants. Les deux tiers des nouveaux venus sont originaires d'Alsace. Paul Lévy écrit : « À ce moment encore on y entendait des chefs d'usine interpeller leurs ouvriers dans le plus pur dialecte de Mulhouse, et, dans les rues, des yô [=ja] dont le circonflexe s'allongeait à n'en plus finir, et des jurons d'Alsace sonores comme des tambours, tandis que le Mülhauser Tagblatt arrivait tous les jours par ballots. Le lycée s'y recruta en partie parmi les enfants des communes allemandes du voisinage, qui venaient en foule y apprendre le français. ». En 1879, plusieurs sociétés industrielles alsaciennes installent à Belfort des établissements qui leur permettront de conserver l'accès au marché français dont la Société Alsacienne de Constructions Mécaniques (SACM), fabriquant des locomotives, moteurs et alternateurs qui deviendra ALS-THOM en 1929 puis ALSTHOM, et depuis 1998 Alstom, ainsi que l'entreprise DMC (Dollfus-Mieg et Compagnie) spécialisée dans l'industrie du textile. Cet important apport alsacien explique que les patronymes alsaciens soient aujourd'hui extrêmement communs à Belfort et dans les environs (par exemple, l'un des ex-présidents du Conseil général se nomme Yves Ackermann, l'un des ex-maires de Belfort, Étienne Butzbach, l'un des deux députés du département, Zumkeller…).
C'est durant la période 1904-1905 qu'Eugène Lux réalise le marché couvert de Fréry sur le modèle des Halles de Paris,.
Époque contemporaine (depuis 1914)
Première Guerre mondiale
Avec la Première Guerre mondiale, Belfort connaît son quatrième siège en l'espace d'un siècle. La place, de nouveau fortifiée quelques décennies plus tôt, accueille à l'aube de la guerre les et régiments d'infanterie, rejoints par les Allemands violent la neutralité belge pour attaquer directement Paris. Ils voulaient éviter d'attaquer à la frontière alsacienne fortement protégée par le Séré de Rivières des places fortes de Verdun, Toul, Épinal et Belfort. De fait, les et régiments d'infanterie marchent vers Mulhouse qu'ils prennent par deux fois mais sont rapidement repoussés. Le front se stabilise au sud du Sundgau pour s'y enterrer jusqu'en 1918. Belfort se prépare dès le lendemain de la mobilisation à la guerre. Le général Frederic Thevenet (1851-1927) fait évacuer les populations les plus exposées, ainsi que les ressortissants étrangers et représentants d'entreprises suspectées de traiter avec l'ennemi. Un laisser-passer est instauré pour les Belfortains restant sur place. La ville sera une ville de ravitaillement, qui vivra pendant quatre ans au rythme des soldats, des blessés et des convois funéraires. L'Union sacrée jouera son plein dans la ville où toutes les synergies militaires et civiles sont activées pour résister. Les usines SACM auront produit cinq millions d'obus, fabriqués par deux équipes féminines. Bien que les combats aient lieu à 15 , Belfort est régulièrement bombardée par l'aviation, nouvelle arme militaire, et un canon longue portée, le langer Max, situé à Zillisheim. La fin de la guerre le 11 novembre 1918 se traduira par une « fête nationale, […] même internationale, étant donné la présence des Américains ».
La commune a été décorée 6 janvier 1920 (remise le 20 juillet) de la croix de guerre 1914-1918.
Entre deux-guerres : l'officialisation du Territoire de Belfort
Le rattachement de l'Alsace à la France pose de nouveau le problème du statut de Belfort : est-ce que la ville doit réintégrer le Haut-Rhin ? Administrativement, elle dépend depuis 1871 de Besançon pour les services de l'Éducation nationale et de Vesoul pour la Poste et les services fiscaux. De même les paroisses belfortaines ont été rattachées à l'archevêché de Besançon. De plus la législation applicable dans le Haut-Rhin, pour partie héritée de celle allemande, mais qui surtout n'a pas connu les évolutions du droit français depuis 1871 et notamment la Loi de séparation des Églises et de l'État, diffère de celle s'appliquant à Belfort. En outre, Belfort aurait été déclassée de préfecture à sous-préfecture. Enfin, les élus locaux se seraient sans doute peu satisfaits de perdre l'autonomie politique acquise, et que soient prises à Colmar les décisions les concernant. Pour ces raisons, le Territoire de Belfort devient, en mars 1922, le .
Le 3 mai 1936, le Front populaire remporte les élections législatives et Léon Blum est nommé président du Conseil. La série de mesures sociales prises par les accords Matignon, signés dans la nuit du 7 au 8 juin de la même année connaissent un écho particulier à Belfort. Fortement industrialisée, la ville connaît d'importants mouvements de grève, notamment dans les usines Alsthom, à l'usine à gaz (centrale électrique), ce qui prive même la ville d'électricité, et à DMC. Ce mouvement s'est même étendu aux grands commerces comme les Galeries modernes, futures Galeries Lafayette et au magasin Monoprix. Les employés de l'usine à gaz obtiennent, à titre d'exemple, une troisième semaine de congés payés, alors que les accords de Matignon n'en prévoyaient que deux.
Seconde Guerre mondiale
Occupation
Après la défaite française, Belfort fait partie de la zone occupée et subit l'occupation allemande. Le secteur de la gare, nœud de communication ferroviaire, est régulièrement bombardé par l'aviation américaine engendrant des dégâts collatéraux, le quartier de la Pépinière sera presque entièrement détruit. Le ravitaillement est relativement assuré pendant l'occupation, cependant la stagnation du front en septembre 1944 complique la situation. Les Alliés sont stationnés depuis le 16 septembre sur la ligne de front Ronchamp-Pont-de-Roide-Vermondans.
Brève installation du gouvernement de Vichy
À la fin du mois d'août, la ville va abriter le gouvernement de Vichy à l'agonie. Face à l'avance des Alliés en France, les Allemands convoient Pierre Laval depuis Paris à Belfort, suivi quelques jours plus tard, le 21 aout, du maréchal Pétain depuis Vichy. Les deux hommes, qui ne s'entendent plus (Pétain refusera de rencontrer Laval à Belfort), sont logés à la préfecture. Un certain nombre de collaborateurs du gouvernement de Vichy se réfugient également dans le Territoire: Paul Marion, secrétaire d'État à la Propagande, Jean Bichelonne, ministre de la Production ou Joseph Darnand, chef de la milice qui s'installe à Valdoie, au château Charpentier. Dès le 24 août, le maréchal Pétain s'installe dans le château de Louise et Louis Viellard à Morvillars où se tiennent des réunions de la Résistance. Pétain fera ainsi passer une lettre à de Gaulle.
Les miliciens s'installent eux à la caserne Vauban (actuel hôtel du département) et dans le lycée de garçons. Ils vont faire régner pendant leur trois semaines de présence un régime de terreur sur la ville, commettant des exécutions sommaires et autres actes mafieux au mois de septembre. Ils volent ainsi 300 millions de francs à la Banque de France, pille un dépôt d'essence et le dépôt de tabac de la ville. La Gestapo s'installe faubourg des Ancêtres, arrête, torture et exécute le résistant Henri Veit.
Le Résistant Lucien Lamet, nommé préfet du Territoire par Gouvernement provisoire de la République française s'installe pendant cette période secrètement en ville.
Étape des dernières déportations vers l'Allemagne
Le 15 août 1944, les prisonniers politiques et alliés arrivés de l’ouest de la France par le convoi de Langeais et ceux du sud-ouest de la France sont internés au fort Hatry dans l'attente d'une déportation vers l'Allemagne. Ils resteront près de 15 jours enfermés dans la caserne avant d’être déportés en Allemagne par quatre convois :
le 26 août, 278 hommes sont déportés à Natzweiler puis Dachau.
le 29 août, 702 hommes vers le KL Neuengamme
le Ravensbrück.
un autre convoi de plus de 400 prisonniers alliés (Américains, Anglais et Canadiens) est aussi acheminé pendant cette période vers l'Allemagne.
Entre le 24 août et le 29 août 1944, 241 prisonniers sont libérés par petits groupes dans la ville,
le 5 septembre, 176 hommes sont déportés vers Buchenwald.
le 3 octobre, 60 détenus à la caserne Friedrich sont déportés vers Buchenwald.
le 17 novembre, un dernier transport de 89 hommes est dirigé vers Gaggenau, situé en Pays de Bade près de Rastatt au sud de Karlsruhe.
Afin d'éviter que les jeunes belfortains ne les rallient, ils sont réunis sous un prétexte au fort Hatry et raflés le 14 septembre 1944 pour être affectés au travail forcé dans les usines allemandes. Ils ne retourneront en France que peu avant la capitulation du Troisième Reich, le 8 mai 1945.
Libération de la ville
La Première armée française dirigée par le général Jean de Lattre de Tassigny est obligée de maintenir le front en attendant la réfection des voies de communication pour permettre le ravitaillement des armées. À la suite du renoncement de Tassigny dans les Vosges le 17 octobre, le général décide de reprendre le plan initial en libérant en premier lieu Montbéliard. Cette ville sera libérée le 17 novembre à la suite d'un plan secret établi par de Lattre de Tassigny laissant la voie ouverte à la libération de Belfort. Cependant le fort du Salbert, au nord-ouest de la ville, bloque l'accès à la ville. Le 19 novembre, une attaque est entreprise contre le fort. Pendant la nuit, 1 500 hommes des Commandos d'Afrique, armées de mitraillettes et de grenades, infiltrent la forêt du Salbert, supprimant silencieusement sur leur passage les postes de garde allemands. Les fossés sont descendus à la corde, les remparts escaladés à l'aide d'échelles démontables. Après cinq heures de marche, la colonne surprend la garnison du fort et la maîtrise rapidement. Le 20 novembre, à l'aube, dévalant les pentes du Salbert, les commandos, bientôt suivis des chars, pénètrent dans Belfort. Après deux jours de combats de rues, Belfort est libérée, le 25 novembre 1944. Le Territoire sera totalement libéré trois jours plus tard.
La commune a été décorée, le 30 juin 1948, de la Croix de guerre 1939-1945 avec palme de bronze.
Des années d'après-guerre au | ]
L'ancien maire Pierre Dreyfus-Schmidt (parti radical) a participé activement à la libération de la ville et retrouve son poste par arrêté préfectoral en novembre 1944. Il est confirmé à cette fonction par sa réélection en mai 1945. Les cinq années d'après-guerre sont florissantes, grâce à la relance économique liée à la reconstruction. Patronat et syndicats s'entendent, avec par exemple la création du comité d'entreprise d'Alstom. Cette embellie est de courte durée et les usines locales connaissent des grèves, quasiment chaque année, les plus sévères ayant lieu en 1950 et 1955. Le décès de Pierre Dreyfus-Schmidt en 1964 entraîne une guerre de succession entre différents partis de sensibilité de gauche et du centre dont le Parti socialiste unifié (PSU), la Section française de l'Internationale ouvrière (SFIO), le Parti communiste (PC) et le Mouvement républicain populaire (MRP). Ce conflit permet à Jean-Marie Bailly de l'Union des démocrates pour la République (UDR) d'accéder à la mairie en 1971. Ceci et le relatif échec des événements de mai 1968 entraînent une chute du nombre de syndiqués à Alsthom passant de plus de 2 000 à moins de mille. La société Alsthom connaît également, en 1979, année de son centième anniversaire, 60 jours d'une grève appelée « Grève du Centenaire ».
En 1970, la municipalité engage des travaux de rénovation et d'embellissement, en passant par la rénovation des façades, l'aménagement ou le réaménagement de parcs urbains et le fleurissement de la ville. La réalisation des différents projets a pris une trentaine d'années. En 1983, Jean-Pierre Chevènement est élu maire de Belfort. Ses mandats et son rôle dans la vie politique du département ont marqué et marquent encore la ville, il développe le tissu universitaire (notamment grâce à ses actions comme ministre de l'Éducation nationale), contribue à la fondation de la communauté de l'agglomération belfortaine en 1999 (en application de la loi qu'il fait voter en tant que ministre de l'Intérieur), à la rénovation et à la colorisation du centre-ville, ainsi qu'à la promotion du projet de LGV Rhin-Rhône. Étienne Butzbach ayant succédé à Jean-Pierre Chevènement, Belfort fête en 2007 le affranchissement de la ville par Renaud de Bourgogne et en 2011, les 130 ans du Lion, année où il est enfin inauguré.
En 2014, l'élection du maire Damien Meslot (LR) — jusque-là député — marque le premier retour de la droite à la mairie de Belfort depuis 1977, avant d'être réélu en 2020. Sa mandature est marquée par la sauvegarde du site d'Alstom, la transformation du quartier de l'ancien hôpital ainsi que la rénovation et piétonisation de la place de la République à l'issue d'une consultation populaire.
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↑ Service des publics et service éducatif des Musées de Belfort, La préhistoire autour de Belfort, Montbéliard, INDICES, 2009, 6 p.
Il s'agit d'une brochure éditée à la demande des Musées de Belfort.
.
↑ D.R., « Les Sièges de Belfort pendant la guerre de Trente Ans » in Bulletin de la société belfortaine d'émulation, [1]
↑ E. Charvériat, Histoire de la guerre de Trente Ans, t. 2, Plon, 1878, [2]
↑ D.R., « Les Sièges de Belfort pendant la guerre de Trente Ans » in Bulletin de la société belfortaine d'émulation, [3]
↑ « », Au fil des mots et de l’histoire, 26 février 2012 (consulté le 11 novembre 2017).
↑ Le territoire de Belfort au temps des Mazarin, catalogue de l'exposition du 6 juin au 26 août 2016, Archives départementales du Territoire de Belfort avec le concours des archives du palais de Monaco, Belfort, mai 2016, 21 pages, préface du prince Albert de Monaco.
↑ Gérard-Antoine Massoni, Histoires de la cavalerie légère : le ISBN , présentation en ligne) chapitre 9.
↑ Si le siège a débuté le 24 décembre et s'est terminé le 12 avril, il a duré 109 jours et non 113. Seule la Société belfortaine d'émulation parle d'une fin de siège le 16 avril dans un de ses comptes-rendus...
↑ Paul Lévy, Histoire de la langue allemande en France, Éditions IAC, Paris, 1952, Tome II p. 153.
↑ loc. cit.
↑ Halle Fréry
↑ sous la direction de Bertrand Lemoine, 100 monuments du ISBN )
Marché couvert de Fréry, Eugène Lux, rue du Docteur Fréry, Belfort/1904-1905, pages 22-33
.
↑ La halle du marché couvert Jules Frery
↑ Communes décorées de la Croix de guerre 1914-1918
↑ a b c d e f et gLaurent Arnold, « Quand Belfort fut le siège du gouvernement de Vichy à l’agonie, en août 1944 », L'Est Républicain, 17 aout 2022 (lire en ligne, consulté le 20 août 2024).
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↑ Liste de la Croix-Rouge de Belfort - Document 1064 W30 AD Territoire de Belfort
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↑ Communes décorées de la Croix de guerre 1939 - 1945
↑ Jean-Pierre Tenoux, « Belfort en couleurs après sa rénovation », Le Monde, 13 janvier 2007 (lire en ligne).
↑ « », sur agglo-belfort.com (consulté le 22 août 2015).
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Héraldique
Article connexe : armorial des communes du Territoire de Belfort.
Les armes de Belfort se blasonnent ainsi :
« d'azur à la tour crénelée et couverte d'or, ajourée et ouverte du champ, maçonnée de sable et girouettée d'argent, accostée des lettres B à dextre et F à senestre capitales aussi d'or, à la champagne cousue de gueules chargée de la croix de la Légion d'honneur. »
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Document créé le 03/01/2018, dernière modification le 30/10/2024 Source du document imprimé : https://www.gaudry.be/lieu/fr/fr-bfc/33453.html
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