Bauhaus
Bauhaus : descriptif
- Bauhaus
Le Staatliches Bauhaus (prononcé : /ˈʃtaːtlɪçəs ˈbaʊˌhaʊs/ ) est une école d'architecture et d'arts appliqués, fondée en 1919 à Weimar (Allemagne) par Walter Gropius
Par extension, Bauhaus désigne un courant artistique concernant, notamment, l'architecture et le design, la modernité, mais également la photographie, le costume et la danse
Ce mouvement a posé les bases de la réflexion sur l'architecture moderne, notamment du style international
L'école a eu trois directeurs : Walter Gropius, Hannes Meyer et Ludwig Mies van der Rohe. En 1933, le Bauhaus (installé à Berlin) est fermé par les nazis, qui le considèrent comme une école enseignant un « art dégénéré »
Sa dissolution est prononcée par ses responsables
De nombreux artistes et professeurs s'exilent aux États-Unis pour échapper au nazisme. Si l'école du Bauhaus est surtout connue pour ses réalisations en matière d'architecture, elle a aussi exercé une forte influence dans le domaine des arts appliqués, à travers les objets usuels qu'elle a façonnés, elle est de plus le précurseur du design contemporain et de l'art de la performance
Le programme du Bauhaus a suscité l'adhésion d'un grand nombre d'artistes d'avant-garde de toute l'Europe, parmi lesquels on peut citer, Johannes Itten, Gunta Stölzl, Vassily Kandinsky, Paul Klee, Oskar Schlemmer, László Moholy-Nagy et Marcel Breuer.
Histoire
La création du Bauhaus
La création du Bauhaus se déroule en Allemagne durant la période troublée de l'immédiat après-guerre, et s'inscrit dans l'histoire des mouvements artistiques novateurs du début du siècle.
La Première Guerre mondiale achevée, Gropius, qui s'était formé dans le cabinet d'architecture de Peter Behrens et avait activement participé au mouvement du Neues Bauen, cherche à développer ses idées novatrices en art et architecture. Après la proclamation de la république de Weimar, en novembre 1918, Gropius propose au gouvernement provisoire de réunir l'École des arts décoratifs et l'Académie des beaux-arts de Weimar. Le , Gropius est nommé directeur de l'école, appelée alors Staatliches Bauhaus zu Weimar (de l'allemand Bau, « bâtiment, construction », et Haus, maison ; Bauhaus : « maison du bâtir, maison de la construction »).
Walter Gropius publie alors le manifeste et le programme du Bauhaus. Dans le Manifeste du Bauhaus, il annonce la vocation de l'école en ces termes : « Le but de toute activité plastique est la construction ! […] Architectes, sculpteurs, peintres ; nous devons tous revenir au travail artisanal, parce qu’il n'y a pas d'“ art professionnel ”. Il n’existe aucune différence essentielle entre l’artiste et l’artisan. […] Voulons, concevons et créons ensemble la nouvelle construction de l’avenir, qui embrassera tout en une seule forme : architecture, art plastique et peinture »,.
Lorsque Walter Gropius crée cette école, il souhaite faire renaître une communauté de travail aussi exemplaire que celle des loges médiévales qui réunissaient les artistes de toutes spécialités (des architectes, sculpteurs, artisans divers). La gravure sur bois du peintre cubiste Lyonel Feininger représentant une cathédrale gothique en tête du manifeste du Bauhaus évoque bien l'état d'esprit du directeur. C'est à un Moyen Âge religieux que se réfère Gropius pour créer une formation synthétisant tous les arts. Il souhaite que l'organisation des métiers, en tant que communauté agissant dans l'unité, facilite la création de l'œuvre d'art totale sous l'égide de l'architecture.
L'idée est de raviver des principes initiés par des courants précurseurs tels que les Arts & Crafts, les Wiener Werkstätte (l’atelier viennois) ou encore le Deutscher Werkbund (association allemande des artisans) afin de délivrer l'Occident de l'horreur de l'ornement.
En outre, l'école expose une nouvelle politique, elle s'ouvre aux femmes et prône leur émancipation, c'est une première dans le domaine de l'art. Malgré cette inégalité révoquée, une différence a pu être observée dans le choix des matières des étudiantes et étudiants. En effet, les femmes avaient tendance à choisir des activités dites « féminine » (peinture, tapisserie…) et les hommes des activités dites « masculines » (architecture, sculpture…). Aujourd'hui, ce sont surtout les noms des étudiants et professeurs masculins que nous retenons tels que Paul Klee, Marcel Breuer, Vassily Kandinsky. Ainsi, la Staatliches Bauhaus permet l'intégration de la femme dans le domaine de l'art, mais nous trouvons toujours des disparités entre les sexes.
Weimar (1919-1925)
Les cours commencent le 1919. Afin de mettre en œuvre ses idées novatrices concernant les arts plastiques, Gropius fait appel à des artistes reconnus. Il recrute comme « maîtres » le peintre Lyonel Feininger, le sculpteur Gerhard Marcks, ainsi que le peintre et professeur d'art Johannes Itten . Malgré les difficultés de l'après-guerre, les ateliers sont peu à peu mis en place.
En 1920, afin de favoriser le rapprochement entre les arts et l'artisanat, le « conseil de maîtrise » décide d'une réforme importante : chaque atelier est placé sous la responsabilité d'un « maître artisan » (Werkmeister) et d'un artiste, « maître de la forme » (Formmeister). Parallèlement, Itten est chargé de l'enseignement du cours préparatoire qui se transforme en un semestre obligatoire. Le peintre Georg Muche est recruté comme « maître ».
Au début de l'année 1921, les peintres Paul Klee et Oskar Schlemmer sont nommés « maîtres », tandis qu'à l'automne, le peintre Lothar Schreyer est nommé responsable du département spectacle. Theo van Doesburg, membre du mouvement De Stijl qui s'est installé à Weimar, donne des conférences au Bauhaus et présente son travail lors d'expositions. À cette occasion, il critique l'expressionnisme dont se réclame Gropius et promeut le constructivisme. Doesburg critique notamment l'artisanat et prône l'utilisation de la machine pour créer.
Au cours de l'année 1922, Gropius fait évoluer les objectifs du Bauhaus vers une réflexion sur l'utilisation des méthodes industrielles pour créer. L'objectif est de briser la dichotomie entre art et industrie en créant en série des objets et des logements fonctionnels accessibles au plus grand nombre. Itten, qui est opposé à cette évolution, est progressivement écarté. Le peintre Vassily Kandinsky est engagé comme « maître ».
Début 1923, Itten quitte le Bauhaus, remplacé par l'artiste constructiviste László Moholy-Nagy, qui devient responsable de l'atelier de métal et assure le cours préliminaire. Gropius modifie la devise du Bauhaus : « L'art et la technique, une nouvelle unité », qui remplace « Il n’existe aucune différence essentielle entre l’artiste et l’artisan » du manifeste. Lors de l'exposition du Bauhaus de l'été 1923 à Weimar, à laquelle participent les architectes Walter Gropius, Mies van der Rohe, J. J. P. Oud, Le Corbusier, Mart Stam ou Frank Lloyd Wright, la maison prototype Haus am Horn est réalisée avec son aménagement intérieur et son mobilier, conçu notamment par Marcel Breuer (coiffeuse, rangements…).
En 1924, le gouvernement social-démocrate est battu aux élections du land de Thuringe. Les conservateurs qui réclamaient la fermeture du Bauhaus décident de diviser par deux la subvention au Bauhaus, puis de ne proposer que des contrats d'une durée de six mois. Dans ce contexte, le 26 décembre 1924, les maîtres du Bauhaus déclarent la dissolution du Bauhaus de Weimar au . Afin de soutenir le Bauhaus, le Cercle des amis du Bauhaus (Kreis der Freunde des Bauhauses) est fondé. Marc Chagall, Albert Einstein et Gerhart Hauptmann font notamment partie du conseil d'administration.
Dessau (1925-1932)
Les élections de 1924 ayant porté l'extrême-droite à la tête de la Thuringe, on assista à la dissolution du Bauhaus de Weimar ; plusieurs villes d'Allemagne proposent d'accueillir le Bauhaus. Les « maîtres » du Bauhaus choisissent Dessau. L'une des raisons du choix de la ville industrielle de Dessau est le manque de logements : Gropius prônant l'industrialisation de la construction se voit également confier la création d'une cité à Dessau-Törten.
Les cours reprennent à Dessau en mars 1925. Tous les maîtres, à l'exception de Gerhard Marcks, déménagent à Dessau, tandis que quelques jeunes maîtres, comme Herbert Bayer ou Marcel Breuer, sont nommés responsables d'ateliers. Gropius adapte le programme d'enseignement du Bauhaus afin de contribuer au développement d'un habitat moderne « vom einfachen Hausgerät bis zum fertigen Wohnhaus (de l'appareil électroménager le plus simple au logement complet) ». Il réduit le nombre d'ateliers à six et fonde Bauhaus GmbH, afin de commercialiser les produits et transformer le Bauhaus en établissement économiquement rentable.
La construction du bâtiment du Bauhaus se déroule au cours des années 1925 et 1926. À proximité, Gropius fait construire les maisons des « maîtres », chargé par la municipalité de Dessau de construire un ensemble de maisons individuelles : la cité de Dessau-Törten. Tous les aménagements du bâtiment (peinture, mobilier, signalisation…) sont réalisés par les divers ateliers du Bauhaus. Les 4 et 5 décembre 1926, le bâtiment est inauguré. Plus de 1 000 invités assistent à une grande fête au cours de laquelle sont organisés des expositions, des spectacles musicaux et théâtraux.
En avril 1927 et pour la première fois de son histoire, le Bauhaus ouvre un département d'architecture sous la direction de Hannes Meyer. Le peintre Georg Muche quitte le Bauhaus et est remplacé par Gunta Stölzl à la tête de l'atelier de tissage.
Début 1928, Gropius annonce sa démission de la direction du Bauhaus pour se consacrer davantage à l'architecture. C'est Hannes Meyer qui lui succède sur proposition de Gropius. Moholy-Nagy, Bayer et Breuer quittent également le Bauhaus. Meyer entreprend une réforme de l'enseignement et de l'organisation du Bauhaus. Il demande aux ateliers d'être plus rentables et de travailler à des créations répondant aux besoins populaires,. Il privilégie une approche scientifique au détriment de l'esthétisme : les créations doivent être « nécessaires, justes et de ce fait aussi neutres […] que l'on puisse imaginer ». Il prône une démocratisation de l'enseignement du Bauhaus et augmente le nombre d'élèves en le portant à 200.
En juillet 1929, les ateliers de métal, de menuiserie et de peinture murale sont fusionnés en un atelier de second œuvre, dirigé par Alfred Arndt . Un département photographie est créé sous la direction de Walter Peterhans, et l'architecte et urbaniste Ludwig Hilberseimer est recruté.
Meyer est de plus en plus contesté par le corps professoral : on lui reproche son approche trop sociale de l'enseignement et sa vision scientifique de la création. Il est également accusé d'avoir poursuivi ses activités procommunistes et de favoriser la politisation de l'école. Il est finalement écarté et remplacé par l'architecte Mies van der Rohe,. Mies entreprend de dépolitiser l'école : plusieurs étudiants communistes qui soutenaient Meyer sont renvoyés. Les nouveaux statuts entrent en vigueur en 1930 interdisant toutes activités politiques. Le programme d'enseignement est également revu. Le cours d'architecture devient plus important.
Klee et Stölzl quittent le Bauhaus. En novembre 1931, le parti national-socialiste, violemment opposé au Bauhaus, remporte les élections au conseil municipal de Dessau.
Début 1932, l'architecte d'intérieur Lilly Reich est recrutée comme responsable des ateliers de tissage et de second œuvre. Le 22 août 1932, une résolution des nazis demandant la dissolution du Bauhaus est finalement votée. Le Bauhaus de Dessau ferme ses portes le 1er octobre 1932.
Berlin (1932-1933)
Après la fermeture du Bauhaus de Dessau, les villes sociales-démocrates de Magdebourg et Leipzig manifestent leur souhait d'accueillir le Bauhaus. Mies van der Rohe avait néanmoins décidé avant la dissolution de déménager le Bauhaus à Berlin et d'en faire une école privée. L'école s'installe donc à Berlin dans une ancienne usine de téléphone. Le , la Gestapo effectue une perquisition et procède à la mise sous scellés du Bauhaus. Mies négocie sa réouverture sous la forme d'une école d'art privée avec les autorités. Ces dernières posent des conditions concernant le renvoi de Kandinsky et Hilberseimer. Le , Mies, ainsi que les « maîtres », prononcent la dissolution du Bauhaus.
S'adaptant à une industrie axée sur la production de masse, la pensée du Bauhaus se développa en direction de la vie moderne et des conditions sociales. Son engagement social l'amena à créer un style convenant à la grande masse aussi bien dans la forme des meubles que dans la construction des maisons.
Le mouvement national-socialiste se réclamait des mêmes idées, mais écartait les tendances du Bauhaus, qualifiées de « bolchevisme culturel ». Vers la fin de la décennie 1920-1930, les architectes de ce mouvement, rejoints par un groupe important au sein même de Bauhaus, s'efforçaient de créer un style populaire. Le point de départ et le concept idéologique étaient cependant totalement différents. Il n'est pas étonnant, dès lors, qu'en prenant le pouvoir en 1933, Hitler et les nazis aient éliminé le groupe adverse. Dans le même temps qu'ils s'en prenaient à l'art dégénéré — ce qui jetait l'anathème sur la peinture moderne —, les hitlériens chassèrent du Bauhaus tous les représentants du « bolchévisme culturel » (selon Goebbels). C'est ainsi qu'un grand nombre de réalisations sociales, longuement mûries au sein de la section d'architecture du Bauhaus, durent céder la place aux conceptions nazies du Sang et du Sol du Troisième Reich. À la place de la lumière et de l'air, symboles d'une lutte passionnée pour un nouvel habitat perfectionné, les nouveaux maîtres exaltaient la foi, la volonté et la force créatrice du national-socialisme, qui étaient selon eux l'« authentique expression de l'âme allemande ».
Le Bauhaus fut ainsi violemment critiqué par les nazis. Joseph Goebbels déclare en 1935 : « J'ai trouvé dans le Bauhaus l'expression la plus parfaite d'un art dégénéré ». Les nazis reprochaient à de nombreux membres du Bauhaus leur passé communiste, ce qui avait déjà contribué au départ de Hannes Meyer de la direction en 1930. Après la fermeture du Bauhaus en 1933, la plupart de ses membres s'enfuirent aux États-Unis (notamment à Chicago), mettant leur savoir-faire dans la construction de gratte-ciel, tandis que le bâtiment de l'école d'Art du Bauhaus est utilisé par les nazis comme une école pour Gauleiter.
L'après-guerre : perception au sein de l'Allemagne de l'Est
Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, le Bauhaus est avant tout perçu comme un mouvement étranger au national-socialisme, voire comme une victime de celui-ci. Il n'est ainsi pas entaché de soupçons, y compris au sein de la future Allemagne de l'Est où se trouve désormais la ville de Dessau. Il devient ouvertement le modèle des nouvelles écoles d'architecture et de design de Weimar, Berlin-Weißensee, Halle ou encore Dresde. Mais rapidement, les forces d'occupation soviétiques imposent les principes du réalisme socialiste et s'opposent à l'héritage intellectuel du Bauhaus. Ce rejet est renforcé par le souvenir de l'émigration aux États-Unis de Walter Gropius ou Ludwig Mies van der Rohe, ce qui faisait d'eux des opposants intellectuels au nouveau régime communiste.
Cependant, dès les années 1960 s'opère un timide retour en grâce du mouvement et de ses préceptes, dans le cadre des grands projets urbanistiques du pays, à l'image de la nouvelle ville de Halle (Halle-Neustadt) conçue par Richard Paulick, un ancien du Bauhaus. Le Bauhaus devient incontournable dans le développement de « logements fonctionnels et bon marché ». La réhabilitation du mouvement n'intervient réellement qu'à partir de 1971, lorsque l'État se fixe comme objectif d'éliminer le problème du logement avant 1990, au moment même où celui-ci commence à faire l'objet de critiques à l'Ouest. On doit notamment cette impulsion à Konrad Püschel, architecte et professeur, lequel a étudié de 1926 à 1930 au Bauhaus de Dessau, ainsi qu'à Bernd Grönwald, plus tard vice-président de l'académie du bâtiment de la RDA, qui a mis en œuvre une stratégie de construction inspirée du Bauhaus.
En parallèle apparaissent les premières recherches — en RDA — sur le Bauhaus. Dès 1963 est éditée la traduction d'une publication soviétique, laquelle est suivie de plusieurs publications par des auteurs est-allemands ainsi que par diverses expositions. Ce renouveau intellectuel n'a cependant pas été sans obstacles idéologiques, certaines études n'étant publiées que plusieurs années plus tard, au milieu des années 1970. L'année 1976 voit officiellement la création du Centre scientifique et culturel Bauhaus Dessau. Celui-ci organise expositions, conférences et entreprend la constitution d'une collection.
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