Judenburg
Localisation
Judenburg : descriptif
- Judenburg
Judenburg (Judembourg en français) est une ville autrichienne du Land de Styrie située sur les rives de la rivière Mur, à l'ouest de la ville de Graz
C'est un centre industriel et commercial de 9 979 habitants (en 2018), qui s'étend sur une zone de près de 64 km2 à 737 mètres d'altitude. L'emblème de la ville est une tête caricaturale de Juif avec un chapeau pointu (judenhut), qui était au Moyen Âge un signe habituel de discrimination des Juifs. Son nom tient à l'histoire de la ville et signifie « château des Juifs » ou plus anciennement « arrondissement des Juifs ».
Géographie
La ville de Judenburg est située dans la Haute Styrie, « le cœur vert de l'Autriche » (Das grüne Herz Österreich), dans la partie Sud de l'Autriche, à l'extrémité ouest du bassin de Aichfeld et s'étend le long de la rivière de la Mur. Elle se positionne à une altitude de 737 mètres dans une région alpine, vallonnée et sylvestre dont la superficie s'étend sur près de 65 km2.
Situation
Judenburg se trouve au voisinage des communes de (à partir du nord, dans le sens des aiguilles d'une montre) :
- Fohnsdorf
- Maria Buch-Feistritz
- Reifling
- Oberweg
- Sankt Peter ob Judenburg
- Pöls
La communauté comporte trois zones cadastrales :
- Judenburg
- Tiefenbach
- Bad Waltersdorf
En 1940, la ville a rejoint la communauté de Murdorf et en 1963, le village de Waltersdorf. Le , les municipalités voisines de Oberweg et Reifling sont fusionnées en Judenburg.
Population
La ville est peuplée de 9 979 habitants (en 2018).
Elle avait atteint le nombre culminant de 12 500 habitants dans les années 1970 pour ensuite décroître.
- Dominique Auzias, Jean-Paul Labourdette, AUTRICHE 2017/2018 Petit Futé (lire en ligne)
Histoire
Archéologie
Les découvertes archéologiques, en particulier le tumulus de Strettweg, à proximité de Judenburg, indiquent que la région était peuplée dès l'époque de la culture de Hallstatt.
Au Moyen Âge
La première mention de Judinburch date de l'an 1074 où sont cités les Juifs de Styrie, l'ancien Idunum. En 1102, l'endroit est désigné sous l'appellation « mercatum Judenpurch » liée aux domaines du château d'Eppenstein, fief ancestral de cette famille noble d'origine bavaroise qui a régné en tant que margrave styrien au en tant que marchands et qui lui permettent de figurer comme un avant-poste commercial sur la route de la vallée de la Mur.
À l'extinction de la dynastie des Eppensteiner en 1122, leurs domaines deviennent la propriété des Otakars (ou von Traungaus) de Styrie et en 1192, celle de la maison de Babenberg, ducs d'Autriche depuis 1156 et ce, avant l'avènement de la maison des Habsbourg.
Les commerçants juifs jouent alors un rôle important dans le commerce transalpin à travers un col de montagne en Carinthie et fondent des comptoirs commerciaux dans la région. En 1224, Judenburg obtient un droit de cité et croît aux , en relation en particulier avec Venise. C'est à cette époque qu'a été construite la vieille ville encore bien conservée.
L'une des principales matières premières exploitées dans la ville est la valériane (Valeriana celtica) dite aussi « fleur de Marie-Madeleine » qui en aurait été utilisatrice, dont l'huile essentielle et l'hydrolat (eau florale) sont employés aux Orient où ils sont convoités. En outre, l'industrie d'extraction du minerai de fer de Styrie occupe la ville. Ainsi, le travail de la fonte donne naissance au premier « Judenburger florin » dans le pays des Habsbourg.
En 1267, le port du chapeau pointu pour tous les juifs est rendu obligatoire à Vienne à la suite du quatrième concile de Latran tenu par Innocent III, puis confirmé par un édit lors du Concile de Vienne de 1312. Il sera ainsi arboré pendant plusieurs siècles.
L'influence et le succès des juifs dans le commerce donnent lieu à de nombreux fantasmes de la part des autres habitants chrétiens, à une époque où les croyances les plus absurdes étaient communes, qui se propagent dans la région. Une accusation de profanation d'hostie contre la communauté juive est signalée à Fürstenfeld, à quelques kilomètres du bourg, et provoque des émeutes. Les juifs de Judenburg sont ensuite accusés de projeter le meurtre de tous les chrétiens dans la nuit de Noël 1312 — projet qui aurait été révélé par une jeune juive qui voulait sauver le chrétien dont elle était amoureuse. Devant la populace déterminée à exterminer tous les juifs, certains d'entre eux s'enfuient mais un grand nombre sont tués malgré les bulles pontificales et l'intervention du duc Albrecht II qui essaient de limiter ces violences sur toute la région. Néanmoins, cet événement ne dissuadent pas les Juifs rescapés à revenir chez eux, peu après. Dès 1329, un Juif nommé David Höschel est mentionné comme prêteur au couvent d'Admont et l'évêque de Lavantegg emprunte de l'argent à des Juifs dont Höbsel et un certain David.
En 1348-1349, tout le pays souffre de la Peste noire et perd une grande partie de sa population. Albert II doit intervenir pour protéger ses sujets juifs persécutés car accusés de propager ce fléau. Parmi les Juifs de Judenburg que le duc d'Autriche prend sous sa protection spéciale, figurent lesdits Haslein, Velchlein, Isserlein et Freudmann dont les archives ont gardé la trace.
À la Renaissance
Aux pogroms. À la suite de nouvelles accusations - ravivées pendant des siècles - sur les communautés juives d'Autriche et d'autres pays, et proférés par les ecclésiastiques de profanation d'hostie et de crime rituels sur des enfants chrétiens, les biens des Juifs sont confisqués, leurs propriétaires sont soumis à la torture puis sont brûlés sur des bûchers, leurs enfants convertis au christianisme et enfermés dans des cloîtres, et les autres se suicident ou sont expulsés d'Autriche en vertu de l'Edit de Vienne que le Prince a dû signer à contrecœur en 1421, poussé par les autorités religieuses.
Au début du grossistes juifs sont établis et prospèrent à Judenburg, ainsi que trente-huit autres riches marchands à majorité juive. Outre l'implication dans le commerce, les Juifs de Judenburg ont l'autorisation en Styrie de s'occuper d'agriculture et de la construction de routes. À cette époque, une rue assez longue appelée « Judengasse » est occupée presque entièrement par les Juifs, mais sans pour autant être considérée comme un ghetto puisqu'ils vivaient aussi dans d'autres parties de la ville où des Chrétiens étaient leurs voisins.
En 1460, Frédéric III octroie à la ville de Judenburg un monopole mondial sur le commerce de la valériane, lequel a perduré cent ans. À cette même date, les annales indiquent qu'à Judenburg, le Juif Cham est propriétaire de six maisons et son coreligionnaire Manl, de trois. L'empereur Frédéric (1424-1493) accorde sa protection aux Juifs de sa province et même à ceux réfugiés d'autres provinces autrichiennes, qui fuient les persécutions antisémites de cette époque.
Elles se reproduisent à nouveau avant que la Diète (Assemblée d'Empire) du duché de Styrie n'obtienne, en 1496, un ordre de l'empereur Maximilien Ier d'expulser tous les Juifs de Styrie, Carinthie et Carniole, au motif qu'ils auraient été encore « coupables d'avoir profané le saint Sacrement de l'autel et assassiné des enfants chrétiens ». Cette expulsion générale eut lieu après tortures, conversions et mises à mort de certains, et permit de s'attribuer les biens des Juifs et d'éteindre les créances qu'ils avaient sur les bourgeois chrétiens. Les Juifs rescapés durent ainsi abandonner Judenburg et beaucoup émigrèrent en Italie.
Conséquemment, la ville connaît une période de déclin au .
À l'époque moderne
Financièrement fondé en 1621 par le baron Balthazar IV de Thanhausen, le collège des Jésuites s'installe dans l'ancien monastère des Augustins: des travaux de construction et d'amélioration y sont faits pour l'adapter aux besoins pédagogiques du 'Ratio Studiorum'. L'église, terminée en 1658, est consacrée l'année suivante.
Précédés de quelques coreligionnaires en 1753 et 1775, des Juifs s'installent à nouveau (deuxième partie du François-Joseph I qui leur octroie officiellement le droit de vendre aux marchés de Graz, à quelques kilomètres de Judenburg. À cette époque, Judenburg est capitale de district.
Lors des guerres napoléoniennes et après sa percée en Italie, le général Bonaparte avance jusqu'à Judenburg et dans la nuit du il lui est proposé une trêve qui prendra le nom de Traité de Leoben qu'il signe avec les Autrichiens, mettant ainsi fin à la guerre de la première coalition entre le Saint-Empire romain germanique et la Première République française.
Le vieux château de Judenburg est victime d'incendies tout au long de son histoire : 1504, 1670, 1709, 1807, 1818 et 1840, dont il reste les ruines. Au début du .
L'ancien décret d'interdiction de séjour des Juifs par Maximilien de 1496 est renouvelé sept fois jusqu'en 1861 où il est finalement abrogé. La vie juive peut reprendre à Judenburg et les Juifs enterrer leurs morts dans leur cimetière.
En 1881, la ville compte plus de 4 000 habitants qui jouissent d'un moulin et de l'installation d'une nouvelle conduite d'eau moderne. La cité devient alors un centre administratif, économique et industriel important au moment de l'ère industrielle où l'exploitation du minerai du fer et de l'acier bat son plein. De nombreuses usines de ferronnerie sont également en fonctionnement
Au | ]
Au début du Graz, possédant un tribunal, une synagogue et un cimetière.
À la même époque, la ville est l'un des centres principaux de sidérurgie en Autriche ; les pionniers Sebastian Danner et Konrad Wittgenstein fondent une usine d'acier moulé qui sera complétée d'un laminoir et d'une forge. L'expression « stahl Judenburg » (acier de Judenburg) a le sens de qualité. Aujourd'hui, seule une petite partie de la production industrielle est restée dans la ville.
De 1910 à 1914, on trouve à Judenburg la première ligne de trolleybus en Autriche. Il y stationne aussi jusqu'en 1914, une garnison de l'Armée impériale austro-hongroise : le bataillon de chasseurs moraves no 17.
Lors de la dernière partie de la Première Guerre mondiale, certains militaires du régiment d'infanterie, à majorité d'origine slovène, refusent de servir l'Autriche-Hongrie. Le soulèvement de à Judenburg prend de l'ampleur et donne lieu à des scènes de pillage dans la ville. Il se solde par une comparution et des condamnations devant le tribunal miliaire menant à l'emprisonnement de nombre de rebelles et à l'exécution des principaux responsables de la mutinerie, le .
Pendant l'ère nazie, un sous-camp du camp de Mauthausen est construit près de Judenburg. Après avoir débarrassé Judenburg de ses habitants juifs, il est alors question de changer le nom de la ville pour lui faire oublier complètement tout lien avec les Juifs et les noms de « Zirbenstadt » et même de « Adolfburg » sont pris en considération. Cependant, la discussion ayant été reportée après la guerre, ce changement n'a pas eu lieu.
À la fin de la Seconde Guerre mondiale, Judenburg se trouve dans la zone britannique d'occupation ; elle accueille plus de 235 blessés arrivés en ambulance en mai 1945 après des affrontements sanglants dans la vallée entre les Britanniques et des soldats, des familles de Cosaques qui refusaient d'être livrés à Tito ou aux communistes, à la suite de la conférence de Yalta de février de la même année. La ville est transformée en un camp DP, camp pour les réfugiés dont des Juifs déplacés et des Russes.
- Art. « Styrie », Jewish Encyclopedia, 1906. Source : Emanuel Baumgarten, Die Juden in Steiermark, Vienne, 1903.
- (en) Art. « Judenburg », Jewish Encyclopedia, 1906. Lire en ligne.
- Site de la ville. Lire en ligne.
- (al) Art. « Judenburg », Encyclopédie Meyers, éd. de l'Institut bibliographique, Leipzig et Vienne, quatrième édition, 1885-1892, pp. 292-293. Lire en ligne.
- Pape : Bulle Cum nimis absurdum. Lituanie, Jewish Encyclopedia de 1906, art. « JudenHut ». Lire en ligne.
- Jean Béranger, Histoire de l'empire des Habsbourg, Fayard 1990, rééd. Tallandier, 2012, T.I p. 103.
- [1] JewishEncyclopedia du 13 janvier 2008
- Henrich Graetz (lire en ligne), p. 342
- Cela fut notamment le cas du cimetière juif de Marburg qui devint la propriété de l'ordre des Minines. Voir JE, art. « Styrie ».
- G.-B. Depping, Les Juifs dans le Moyen-âge. Essai historique sur leur état civil, commercial et littéraire, Paris, Imprimerie Royale, , p. 533
- (en) Art. « Judenburg », Travel Guide : Austria, DK Eyewitness Travel, 2012, p. 174. Lire en ligne.
- Recueil de plans d'édifices de la Compagnie de Jésus conservé à la Bibliothèque nationale de Paris / Jean Vallery-Radot,... ; Bibliothèque nationale. Cabinet des estampes, 1960. n° 890 = Vallery-Radot, 890. Voir en ligne.
- Marie-Nicolas Bouillet, Dictionnaire universel d'histoire et de géographie : contenant l'histoire et de géographie, Hachette & Cie, (lire en ligne), « "Judenburg" », p. 931
- Histoire, site de la société (de) Stahl Judenburg GmbH.
- Vgl. Michael Schiestl : „Zirbitz-“, „Adolf-“ oder „Jubelburg“. Dokumente des „gesunden Volksempfindens“. In: Berichte des Museumsvereines Judenburg. 33 (2000), S. 23–32.
- Portail touristique. Lire en ligne.
- Voir « Judenburg » au US Holocaust Memorial Museum, en ligne.
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Judenburg dans la littérature
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