Olivier V de Clisson
Olivier V de Clisson, né le au château de Clisson et mort le au château de Josselin, est un grand seigneur féodal breton, connétable de France, comte de Porhoët, baron de Pontchâteau. Représentant le plus illustre de la famille de Clisson, sa cruauté au combat lui vaut d'être surnommé le Boucher.
Son existence est jalonnée par deux grands retournements : d'abord ennemi des Valois ayant fait exécuter son père, il se retourne contre son suzerain, le duc Jean IV de Bretagne, alors allié aux Anglais, pour se mettre au service des rois de France Charles V puis Charles VI, avant de se réconcilier avec Jean IV et devenir tuteur du fils et successeur de celui-ci, Jean V. Il fait preuve d'une exceptionnelle valeur militaire et est nommé connétable de France en 1380. Sa position de grand féodal fortuné, impliqué dans les conflits de succession en Bretagne, le plonge au cœur des antagonismes de la guerre de Cent Ans.
Guerre de Succession de Bretagne
Olivier de Clisson, puissant féodal
Après une dizaine d'années passées en Angleterre, Olivier, âgé de vingt-trois ans, accompagne Édouard III qui débarque en France en 1359 et mène une guerre de harcèlement dans le Poitou à la tête d'une armée anglaise. Aux côtés de Jean IV de Bretagne, fils de Jean de Montfort, Olivier de Clisson va participer activement à la guerre de Succession de Bretagne qui dure depuis 1341, année de la mort de Jean III de Bretagne. Jeanne de Belleville meurt en 1359 et le roi d'Angleterre confirme la jouissance par Clisson des possessions bretonnes de son beau-père Gautier de Bentley. Olivier IV est réhabilité en 1360 par le roi de France Jean II le Bon en marge du traité de Brétigny du , qui vise à désamorcer les sources de conflit entre la France et l'Angleterre et son alliée, la Bretagne. Ce traité ouvre une trêve de neuf ans entre les deux royaumes ennemis. Après la réhabilitation posthume de son père, Clisson retrouve ses droits sur les riches seigneuries familiales en 1361. La même année, il se marie avec Catherine de Laval et de Châteaubriant, riche héritière de la famille de Laval, et petite-fille du duc Arthur II de Bretagne. Dès lors, il devient à la fois cousin germain de Jean de Montfort et de Jeanne de Penthièvre, la femme de Charles de Blois, ce qui fait de Clisson un parent du roi de France. Cette alliance lui ouvre des perspectives politiques nouvelles, d'autant qu'Olivier de Clisson est devenu en quelques années un féodal disposant de vastes terres et d'importants revenus.
Bataille d'Auray
Clisson fait partie des chefs de troupes qui secondent Montfort dans sa tentative échouée de prise de Nantes, puis du siège de Bécherel en 1363. En , quelques mois après l'avènement de Charles V, Jean IV profite de la situation troublée que connaît la France depuis la capture du roi Jean le Bon pour porter un effort décisif avec les Bretons de son parti. Aidé d'un corps anglais sous les ordres de John Chandos, ce capitaine qui avait décidé du sort de la bataille de Poitiers en 1356, Jean IV assiège Auray, ville au secours de laquelle se portent Charles de Blois et un corps de troupes françaises commandé par Bertrand Du Guesclin.
Les deux armées s'affrontent sous les murs de la ville le . Les monfortistes y sont retranchés, et Jean de Monfort propose, pour pallier l'infériorité numérique de son armée, d'attaquer le camp français par surprise. Mais le commandement anglais retient la proposition d'Olivier de Clisson d'attendre que l'armée du roi de France soit contrainte de gravir la pente les menant à Auray, et mise sur la défensive, choix tactique que Clisson reprendra au cours de sa carrière militaire.
Le sort est d'abord indécis, mais les trahisons dans le parti de Blois, et l'appui apporté par Chandos et Olivier de Clisson à Jean IV décident de l'issue de la bataille. Ils réussissent à disjoindre les troupes de Charles de Blois afin de les combattre séparément. Éloigné du gros de son armée, Charles de Blois est entouré par ses ennemis et tué dans la mêlée, tandis que Du Guesclin est fait prisonnier, et libéré contre une forte rançon en 1365. La guerre de succession prend fin avec cette bataille, au cours de laquelle Olivier de Clisson joue un rôle important, montrant l'exemple par son ardeur au combat ainsi que le relate l'historien de l'époque, Jean Froissart. Au cours des combats, Clisson est blessé et perd l'usage d'un œil, ce qui lui vaut le surnom « l'Éborgné d'Auray ».
Traité de Guérande
La veuve de Charles de Blois, Jeanne de Penthièvre, s'incline devant les événements, et les pourparlers de paix entre les maisons de Blois et de Montfort commencent au château de Blain qu'Olivier vient de recouvrer.
Par le traité de Guérande de 1365, Jean IV, surnommé le Conquérant, est reconnu seul duc de Bretagne. Olivier V se repose à Blain, soignant sa blessure, lorsqu'il apprend que Jean IV a préféré donner à l'Anglais John Chandos le château du Gâvre et sa forêt. Or, Olivier de Clisson les convoite en récompense de ses bons et loyaux services. Alors qu'il exprime son mécontentement au duc, celui-ci lui répond évasivement. Clisson, saisi de colère, s'écrie J'aimerais mieux me donner au diable que de voir l'Anglais mon voisin
et, quinze jours plus tard, incendie le château du Gâvre et en fait transporter les pierres en son château de Blain à quelques kilomètres au sud. Le duc lui confisque alors la seigneurie de Châteauceaux.
Jean IV envoie Clisson à Paris en ambassade auprès de Charles V pour obtenir du roi de France des garanties quant au respect du nouveau statut de la Bretagne après le traité de Guérande. Le , Olivier V est reçu en grande pompe, le monarque français n'hésitant pas à flatter l'orgueil de Clisson pour détourner celui-ci des Montfort. En 1367, Olivier de Clisson participe, en tant que général anglais aux côtés de Robert Knolles et sous le commandement du Prince noir, à la bataille de Nájera (Castille) face aux troupes commandées par Bertrand Du Guesclin. Les Français perdent le combat et Du Guesclin est fait prisonnier pour la seconde fois. En 1369 par contre, Clisson combat côté français. Au printemps, il déconseille au roi de chercher à débarquer en Angleterre étant donné la faiblesse de la flotte française, et en août de la même année, Olivier V échoue, avec Amaury de Craon, à prendre Saint-Sauveur-le-Vicomte aux Anglais, échec dû à sa double allégeance, puisqu'il est contraint de lever le camp pour aller négocier au nom de Jean IV auprès de Charles II de Navarre. Charles V, pour s'attacher les services de Clisson, lui restitue les possessions normandes d'Olivier IV, le dispensant de certains impôts.
Ce sont ces terres normandes que Clisson échange contre la seigneurie de Josselin avec le comte d’Alençon, son cousin, en 1370,. Quelques mois plus tard, Clisson formalise son changement de camp, puisqu'il signe une charte établissant la suzeraineté du roi de France sur Josselin, située en plein cœur de la Bretagne ducale,. Olivier V, dont le tempérament s'accommode mal de la vassalité, n'est pas fait pour s'entendre avec le duc et ne supporte plus les Anglais qui l'entourent. De son côté, le duc n'a aucune sympathie pour celui à qui il doit en grande partie sa couronne ducale. Jusqu'en 1396, la lutte entre les deux hommes marque l'histoire de la Bretagne.
Au service du roi de France
Alliance avec Bertrand Du Guesclin
Charles V fait alors appel à Olivier de Clisson pour mettre fin aux agissements des grandes compagnies qui, sans engagement après la victoire anglaise en Espagne, pillent le sud-ouest de la France. Clisson entre au service de la monarchie française pour la première fois. Le , Clisson s'allie avec Du Guesclin, par le serment de Pontorson : « Nous, Olivier, seigneur de Cliçon, voulons estre alié et nous alions à toujours à vous, messire Bertran Du Guesclin, dessus nommé, contre tous ceulx qui peuvent vivre et mourir, excepté le roy de France, ses frères, le vicomte de Rohan et noz autres seigneurs de qui nous tenons terre (…) ».
Bertrand Du Guesclin est depuis le de la même année connétable de Charles V et ennemi du duc de Bretagne. Aidé de Clisson, il est vainqueur des Anglais lors de la bataille de Pontvallain, premier des succès dont Du Guesclin tirera sa renommée, bien que la compétence militaire de Clisson ait été déterminante pour compenser le manque de vision stratégique de son nouvel allié. Les termes du serment de Pontorson entre les deux nouveaux alliés précisent que les bénéfices des éventuelles conquêtes sont partagés par moitié. Cette alliance est révélatrice de l'état général des liens vassaliques, le temps ayant conduit à une situation où ces liens sont entremêlés et inextricables, chacun devenant libre de choisir son camp selon les intérêts du moment. La fraternité d'armes est devenue supérieure au lien vassalique, Clisson respectera le serment fait à Du Guesclin. Par ce pacte, Clisson devient un fidèle des Valois, meurtriers de son père. La même année, lors d'un raid de Robert Knolles aux portes de Paris, il conseille au roi une tactique prudente, une stratégie défensive pour éviter une bataille rangée sans l'avoir suffisamment préparée ; Knolles se détourne de la capitale.
Campagne militaire en Poitou et en Saintonge
Le roi de France choisit d'attaquer les Anglais dans leurs possessions du sud-ouest de la France, la Guyenne. Bertrand Du Guesclin et Olivier de Clisson partagent le commandement militaire et, tandis que le premier mène le combat en Auvergne et en Rouergue, le second s'en prend aux positions anglaises du Poitou, de Saintonge et d'Anjou au cours de l'. Les Anglais ripostent en menant une expédition contre la place forte de Moncontour, qui chute après dix jours de siège. Olivier de Clisson est chargé par Charles V de reprendre la ville.
Clisson tardant à prendre la place, et personnellement humilié par un noble assiégé, Du Guesclin se joint au combat. La ville est reprise en 1372, victoire suivie de la prise de nombreuses autres cités dont Loudun, Saint-Jean-d'Angély et Saintes. Les habitants de La Rochelle se chargent eux-mêmes de maîtriser la garnison anglaise avant d'ouvrir leurs portes aux troupes françaises.
Massacre de Benon
La guerre est menée de manière cruelle par les deux camps. À plusieurs reprises, comme lors de la prise de Moncontour, les Anglais n'épargnent que les prisonniers pouvant payer rançon. L'écuyer d'Olivier de Clisson est capturé par l'ennemi à Benon en Saintonge, torturé et tué. Par vengeance, Clisson, après avoir pris la citadelle, exécute lui-même les quinze prisonniers capturés à cette occasion. Il a de même la réputation de ne pas hésiter à mutiler les ennemis captifs, leur coupant un bras ou une jambe. Du Guesclin affirme Dieu ! Par le corps de saint Benoît, les Anglais ne se trompent pas quand ils l'appellent le boucher !
. Ce surnom reste associé à Clisson dans l'histoire.
Exil de Jean Exil de Jean IV
Après la victoire sur Charles de Blois et l'accession au titre ducal, Jean IV est débiteur financier auprès du roi d'Angleterre Édouard III. À l'image de Thomas Melbourne, receveur général et trésorier du duché, certains des conseillers de Jean IV sont les Anglais qui l'ont entouré lors de son exil. La rancœur exprimée par Olivier de Clisson contre le duc dès 1365 est peu à peu partagée par d'autres nobles bretons. À cela s'ajoute le mécontentement populaire consécutif à la mise en application d'un impôt ducal permanent, le fouage. Constamment obligé de louvoyer entre la pression française, la contestation du puissant parti Clisson-Penthièvre et son lien de vassalité avec le souverain anglais, le duc de Bretagne choisit en 1372 de signer un traité d'alliance avec l'Angleterre, accord habile de la part du duc breton au regard des avantages qu'il en tire. Mais les termes signifient nettement, aux yeux du roi de France, la soumission à la couronne anglaise. Le duc tente de calmer le monarque français en expliquant qu'il est contraint d'accueillir des troupes anglaises pour contrer Olivier de Clisson, sans succès. Le , Charles V ordonne à Bertrand Du Guesclin de s'emparer du duché. Pour s'assurer du soutien de Clisson, il lui donne la seigneurie de Guillac.
Du Guesclin et Clisson mènent alors une guerre de propagande à destination de la noblesse bretonne pour discréditer la politique de Jean IV. Des troupes anglaises stationnent à Derval, Rougé, Brest, Saint-Mathieu. Plus grave encore pour les intérêts des nobles bretons, des Anglais reçoivent toujours des seigneuries et des rentes importantes. Malgré la faiblesse quantitative de ces récompenses données à ses alliés, Jean IV est jugé trop soumis aux Anglais. Abandonné par la majorité de la noblesse bretonne, il est contraint à l'exil et traverse la Manche le .
Olivier de Clisson corégent de Bretagne
Clisson aurait pu prétendre au titre de duc, mais Charles V choisit de mettre la main sur la Bretagne, et place son frère, le duc d'Anjou, marié à une Penthièvre, fille de Charles de Blois, à la tête du duché, avec le titre de « lieutenant du roi ». Mais cette nomination n'est qu'honorifique, le duc d'Anjou ne se rendant jamais en Bretagne. Olivier de Clisson est nommé régent pour la partie gallophone, et Jean Ier de Rohan pour la partie brittophone. Les deux s'entendent parfaitement et deviennent parents par la suite.
Sur le plan militaire, l' débute par le siège de Derval, lieu symbolique puisque le château de la cité est propriété de Robert Knolles. Concarneau est conquise, et tous les Anglais la défendant sont tués. Jean IV obtient que le duc de Lancastre intervienne dans le duché breton à la tête de dix mille hommes. Jean IV reprend Saint-Pol-de-Léon et assiège Saint-Brieuc. Dans le Sud de la Bretagne, Olivier de Clisson assoit sa domination militaire. Le duc de Bretagne tente de le capturer en assiégeant Quimperlé, mais une trêve conclue entre les rois de France et d'Angleterre l'empêche de profiter d'une situation quasi-désespérée pour Clisson. À la reprise des combats, l'avantage va au Français. Le siège de Brest dure de 1373 à 1377 ; Olivier de Clisson fait construire la forteresse de Guesnou pour interdire l'accès à la ville par la mer. Brest est la dernière possession anglaise en Bretagne. Après la prise d'Auray par Olivier V en 1377, Jean IV n'est le suzerain que de Brest et d'une petite partie de la péninsule du Finistère.
Clisson fait du château de Josselin une imposante place-forte. Sur la base d'un fort édifié au xiiie siècle, il bâtit une forteresse de 4 500 m2 disposant de neuf tours et d'un donjon de 26 mètres de diamètre et 32 mètres de hauteur. Il épouse en secondes noces Marguerite de Rohan, sœur du vicomte Jean Ier de Rohan, en 1378. Immensément riche, il apparaît alors comme le chef du parti français en Bretagne.
Retour de Jean Retour de Jean IV
Charles V fait le choix politique d'annexer la Bretagne au royaume de France le , ce qui provoque un revirement de la noblesse bretonne, y compris Jeanne de Penthièvre, puisque le traité de Guérande n'est plus respecté. Le roi de France demande à quatre grands seigneurs bretons jusqu'ici fidèles à la France de donner leur position sur le sujet. Guy XII de Laval refuse de lutter contre Jean IV, Rohan promet timidement son aide, Clisson et Du Guesclin affirment leur fidélité au Valois. Jean IV retrouve des appuis sur sa terre natale, un gouvernement provisoire breton ayant été créé pour faire face au roi de France. Clisson voit s'échapper là une chance de prendre le titre de duc. Il ne parvient pas à convaincre le roi de France que le duc de Bretagne a de nouveau passé un accord secret avec le roi d'Angleterre, Richard II, et souligne vainement que si Jean IV est entouré de beaucoup moins d'émissaires d'outre-Manche qu'auparavant, il a pour conseiller un proche du roi anglais. Jean IV est rappelé en Bretagne, et recouvre son duché à l'exception des terres tenues par Olivier V, notamment Nantes dont ce dernier est brièvement institué gouverneur en 1379. Le duc parvient à rallier les Rohan, Jean Ier devenant son chancelier. C'est un échec pour Clisson, qui mise alors tout sur le royaume de France.
Connétable de France
Après la mort de Du Guesclin, le roi Charles VI, peu après son sacre à l'âge de douze ans, élève Olivier de Clisson au rang de connétable de France le , avec le soutien du duc d'Anjou et malgré l'opposition des ducs de Berry et de Bourgogne, tous trois oncles du roi, et après que les deux autres candidats ont décliné l'offre considérant que Clisson était le plus apte. Outre le fait d'avoir prouvé ses compétences au combat, Olivier V est breton comme Du Guesclin, à une époque où les mercenaires bretons formés lors de la guerre de Succession de Bretagne sont prépondérants. Le rôle de connétable est très important politiquement, et il donne le droit à Clisson de conserver le butin de guerre hormis l'or, l'argent et les prisonniers, privilège dont Olivier de Clisson saura tirer profit.
Face au deuxième personnage du royaume, le duc de Bretagne ne peut considérer Clisson comme un simple vassal ; peu de temps après le second traité de Guérande du qui normalise les relations entre le duché de Bretagne et le royaume de France, Jean IV et Clisson signent un traité de « bons alliés » le , renouvelé le . La rivalité des ducs de Berry et de Bourgogne avec Clisson permet à Jean IV d'obtenir des appuis côté français.
Campagne de Flandre
À la suite de la révolte en Flandre contestant le pouvoir féodal, le roi de France Charles VI décide d'intervenir pour aider son allié le comte de Flandre, Louis de Male. L'appel à l'aide vers l'Angleterre ne permet aux Flamands insurgés d'obtenir qu'un faible soutien militaire. Après avoir mené l'armée royale vers celle des révoltés, le , Olivier V de Clisson conduit ses troupes à la victoire lors de la bataille de Roosebeke au cours de laquelle vingt-cinq mille hommes sont massacrés. Le connétable a su appliquer une tactique efficace. Ce sont donc des milices bourgeoises composées d'artisans et de commerçants que les troupes aguerries d'Olivier de Clisson écrasent dans le sang. Les troupes françaises se livrent à un pillage massif.
Le soulèvement flamand provoque des désirs d'émancipation à Paris. La décision de rétablir un impôt aboli par Charles V soulève les bourgeois de Paris lors de la révolte des Maillotins en . Le départ du roi Charles VI parti accompagner ses troupes en Flandre donne l'espoir d'un affaiblissement du pouvoir royal aux bourgeois parisiens. Mais la puissance des troupes de Charles VI, victorieuses en Flandre, reste intacte et les Parisiens ne choisissent pas l'affrontement. L'armée conduite par Olivier de Clisson entre dans la capitale et exécute la répression. En , Clisson et le sire d'Albret font comparaître les riches bourgeois, et leur signifient : Corps et biens, vous êtes en cas de forfaiture. Voyez ce que vous choisissez : justice ou miséricorde.
Ils choisissent miséricorde, c'est-à-dire le versement d'une forte somme en fonction de la fortune de chacun. L'entourage du roi est enclin à la magnanimité et à l'abandon d'une partie des « amendes », l'hôtel de Clisson est baptisé par les bourgeois parisiens « hôtel de la Miséricorde ».
Projet de débarquement en Angleterre
Le traité qu'il a signé avec Jean IV n'empêche pas Olivier de Clisson de payer en 1384 la rançon du comte de Penthièvre, alors otage en Angleterre, Jean de Blois, fils de Charles de Blois, l'ennemi des Montfort. De plus, Clisson lui donne sa fille Marguerite, dite Margot, en mariage. Selon les clauses du traité de Guérande, Jean IV n'ayant pas d'enfant mâle, Jean de Blois, fils de Jeanne de Penthièvre, est alors héritier du duché.
Le connétable de Clisson monte à partir de 1384 le projet d'envahir l'Angleterre et fait construire une « ville en bois », immense radeau fortifié et démontable. Pour transporter les troupes, mille trois cents navires sont rassemblés, protégés par quatre-vingt-dix-sept vaisseaux de guerre. Cette opération très onéreuse n'aboutit pas : au moment de sa réalisation, en , l'attente des troupes du duc de Berry, un des oncles du roi, se prolonge, et ce retard, semble-t-il volontaire, empêche le bon déroulement de l'opération, d'autant que le duc de Bourgogne tombe malade. Le mauvais temps empêche la réalisation du projet, qui est finalement abandonné en 1387, alors que Clisson est enlevé par Jean IV, ce qui provoque une nouvelle tension franco-bretonne et détourne Charles VI de l'Angleterre.
Première tentative d'assassinat
En , Olivier de Clisson est invité par Jean IV à assister à la session du parlement de Bretagne, à Vannes, et à inaugurer le château de l'Hermine que Jean IV a fait construire. Le , le connétable est saisi et emprisonné, et le duc de Bretagne ordonne qu'on l'exécute (il était prévu d'enfermer Clisson dans un sac, et de le jeter à l'eau), mais cet ordre n'est pas suivi par Jehan de Bazvalan , maître d'armes de Jean IV, qui se contente de le maintenir enfermé. Au matin, Jean IV s'enquiert du sort de Clisson, et Jean de Bazvalan avoue la non-exécution de l'ordre, et le duc le remercie finalement de cette prudence. Clisson doit payer une forte somme et remettre à Jean IV les forts de Blain, Josselin, Jugon et Le Guildo. Le roi de France rend un arbitrage en 1388 qui restitue au connétable les terres confisquées, mais pas la rançon. Il s'agit de ménager le duc, afin d'éviter que la Bretagne ne serve de point d'appui aux armées anglaises.
Le gouvernement des marmousets
Côtoyant le roi depuis que celui-ci a douze ans, Clisson joue un rôle particulier, que l'historienne Françoise Autrand qualifie d'avunculaire. Arrivé à sa majorité en 1388 à l'âge de quinze ans, Charles VI décide de gouverner sans ses véritables oncles, le connétable de Clisson fait partie du groupe qui est à la tête du gouvernement : outre Clisson, connétable, on trouve le chambellan de Charles V Bureau de La Rivière, Jean Le Mercier promu grand maître de l'Hôtel du roi, et Jean de Montaigu. Cet épisode politique est connu sous le nom de « gouvernement des marmousets ». Clisson, pourtant chef de guerre, est adepte de la notion de bon gouvernement, de l'allègement des impôts, de la prise en compte des doléances des sujets.
Dans le même temps apparaît un changement dans la stratégie de la couronne de France. Jusqu'alors le roi de France mise sur Clisson, chef de file de la famille bretonne qui peut postuler au titre de duc si Jean IV n'a pas d'héritier mâle. Or le duc de Bretagne, a un fils avec Jeanne de Navarre, prénommé Jean lui aussi, qui naît le . Sa succession semble donc assurée, et la monarchie française mise moins sur Clisson et plus sur un accord avec Jean IV.
Seconde tentative d'assassinat
En 1392, il reprend aux Anglais l'île d'Yeu, dont le château-fort a été construit par son père Olivier IV. Le , alors qu'il se rend de l'hôtel Saint-Paul à son hôtel particulier, Olivier V de Clisson fait l'objet d'une seconde tentative d'assassinat, à l'entrée de la rue de la Culture-Sainte-Catherine à Paris, menée par Pierre de Craon. Après l'échec de l'agression, au cours de laquelle Clisson est blessé, de Craon affirme qu'il a commis son acte seul, contre un ennemi personnel, mais pour l'entourage du roi de France c'est le duc de Bretagne qui est l'instigateur de cet attentat. Jean IV ayant refusé de livrer le criminel au roi, Charles VI prend en la tête d'une armée pour attaquer le duché breton, mais dans les environs du Mans, il est frappé par sa première crise de folie qui met un terme à l'expédition.
Retour en Bretagne
Lorsque Charles VI entre pour la première fois dans une phase de démence, les oncles du roi reviennent au pouvoir. Ils en chassent les Marmousets et en premier lieu Olivier de Clisson, qui est destitué de sa charge de ministre. Le parlement le juge « faux traître », le condamne le pour s'être enrichi illégalement au bannissement du royaume et au versement de deux cent mille livres, ainsi qu'à la restitution de l'épée de connétable. Clisson refuse de rendre l'épée et se réfugie d'abord au château de Montlhéry, puis en Bretagne en son château de Josselin. Jean IV veut profiter de la disgrâce de son ennemi et assiège Josselin en 1393. En 1394, Charles VI redonne sa confiance à Olivier V et, bien que Philippe d'Artois lui ait succédé en 1392, le roi confirme Clisson dans sa fonction de connétable, ce qui lui permet de tenir tête militairement au duc, notamment à Saint-Brieuc. En 1397, Louis de Sancerre est nommé connétable en remplacement de Philippe d'Artois décédé, mais Clisson conserve le privilège d'être le détenteur de l'épée. Cette même année 1397 il conclut une alliance avec Louis d'Orléans, frère du roi Charles VI.
Après trente ans de conflit, par l'entremise du duc de Bourgogne, Clisson se réconcilie en 1396 avec son suzerain Jean IV de Bretagne. Ce dernier lui envoie son fils comme garant de sa sincérité et le fait venir à Vannes. Ils se promettent paix loyale et bonne amitié jusqu'à la mort. La promesse est tenue, les deux hommes sont en paix lorsque le duc Jean IV meurt en 1399. Son fils n'a que dix ans, et la régente Jeanne de Navarre épouse le roi Henri IV d'Angleterre. Louis d'Orléans propose à son frère Charles VI de confier le gouvernement de la Bretagne à Olivier de Clisson, pour éviter qu'elle passe sous domination anglaise. Mais c'est finalement Philippe le Hardi qui devient régent du duché.
Marguerite de Clisson, fille d'Olivier, surnommée Margot, prenant le parti de son mari Jean de Bretagne, comte de Penthièvre, et de ses prétentions sur le duché, s'attire la colère de son père qui lui aurait prédit : Perverse, tu seras la ruine de tes enfants
. Prédiction qui se vérifiera, puisque deux des fils seront exécutés pour lèse-majesté après avoir enlevé le duc et le troisième sera emprisonné durant vingt-cinq ans. L'affrontement de Clisson et de sa fille en 1399 a donné lieu à une légende selon laquelle il l'aurait de colère menacée avec un épieu. Dans sa fuite, Marguerite se serait cassé la jambe, incident expliquant la claudication qui lui vaut le surnom de « Margot la boiteuse ». Cette légende a sans doute été inventée par le clan adverse après 1420.
En 1401, le duc de Bourgogne menaçant Paris, Louis d'Orléans obtient l'appui d'une cinquantaine de vassaux dont Clisson, qui envoie ses troupes. Olivier V préside à Rennes en 1402, en tant que tuteur, les cérémonies du couronnement du jeune duc Jean V, fils de Jean IV, temporairement placé sous la régence du duc Philippe II de Bourgogne. Jean V, devenu duc régnant en 1404, prend à son égard des mesures vexatoires, et, en représailles d'un procès que Clisson lui intente, veut confisquer ses terres et n'accepte qu'au dernier moment une transaction financière.
Peu après avoir fait mentionner dans son testament le souhait de voir restituer l'épée de connétable qu'il détient toujours, Olivier de Clisson meurt à Josselin le à l'âge de 71 ans. Il est alors enterré dans la chapelle du château de Josselin où sa tombe est profanée en 1793.
Source: Wikipedia ()
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